Pour cinq dirigeants de Bouygues, ce géant du BTP, promoteur, bétonneur, patron de TF1et parmi les premiers de la téléphonie mobile, il aura suffi d'attendre avec un bon avocat pour sortir indemnes du scandale de " l'affaire Drapo ", qui avait défrayé la chronique en 1995.

Drapo était le nom d'un logiciel informatique qui permettait de fausser les procédures d'appels d'offres des marchés publics ou privés. Pendant une dizaine d'années, il avait été utilisé pour truquer les propositions et surévaluer les coûts des chantiers de 5 à 10 %, en s'assurant d'emporter les marchés après entente entre concurrents. Grâce à ce Drapo, Bouygues avait raflé les chantiers du Stade de France et de la ligne du RER Eole, payés avec les deniers publics probablement beaucoup plus cher que nécessaire, si l'on en croit donc les performances de ce logiciel Drapo...

Les dirigeants de Bouygues auraient pu poursuivre comme cela longtemps si un responsable informatique, au courant de la petite combine, n'avait vendu la mèche à la justice après avoir été licencié. Les dirigeants de Bouygues étaient alors mis en examen pour " pratiques anticoncurrentielles " et l'instruction judiciaire commençait...

Seulement voilà, Bouygues a pu se payer des avocats spécialistes et suffisamment procéduriers pour réussir à faire traîner en longueur l'instruction jusqu'à ce qu'elle capote et que la date de prescription pour les faits reprochés soit atteinte. Fin 2002, l'affaire était close et aucune poursuite ne sera menée contre les dirigeants de Bouygues... Les affaires peuvent continuer, avec ou sans Drapo.

L'énorme scandale de 1995 fait un énorme plouf aujourd'hui. Un scandale qui n'est plus qu'un " fait divers chez les riches " et pour lequel la justice ne demande des comptes à personne, alors que les faits, les fraudes et les coupables sont tous connus.