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Leur société
Metaleurop : Première manifestation contre la fermeture
Le lundi 27 janvier, c'était la première manifestation contre la fermeture de l'usine Metaleurop, à Noyelles-Godault, Pas-de-Calais.
Le 18 janvier, les principaux actionnaires du groupe Metaleurop annonçaient qu'ils se retiraient du capital de cette usine de plomb et de zinc. Le coût de la dépollution, estimé à plus de 115 millions d'euros, le coût d'un plan social en discussion concernant 240 travailleurs sur les 830 de l'usine, la baisse des cours du plomb et du zinc, c'était trop pour eux ! Ces " traders ", pour reprendre le langage des économistes, étaient prêts à engranger les profits, mais sûrement pas à payer ou même à les voir se réduire.
Ils condamnaient ainsi l'usine au dépôt de bilan. Elle manque de fonds propres pour payer ses fournisseurs, ses sous-traitants, mais surtout pour payer les salaires et les indemnités prévues par le plan social. Il semble qu'elle s'engage tout juste à payer les salaires de janvier. Au-delà, c'est l'inconnu... Le tribunal de Béthune a décidé de mettre l'usine en " redressement judiciaire ". Mais qu'en sortira-t-il ? Le directeur et les syndicalistes se disent satisfaits car ils estiment qu'ils ont trois mois pour " pouvoir faire leurs preuves ".
Des preuves de quoi ? L'usine a continué de tourner, autant parce que les travailleurs souhaitaient se constituer un " trésor de guerre " que parce que personne dans l'usine ne voit quoi faire d'autre. Mais les cheminées devraient s'arrêter bientôt, par manque de tout.
La manifestation du 27 janvier était la première réaction publique. Elle était importante, près de 2 000 personnes, avec les familles des travailleurs de l'usine et aussi de nombreux habitants de la commune, conscients que leur région est en train de mourir. Mais même si beaucoup ressentent de la colère, elle ne s'exprime pas encore vraiment, et les politiciens locaux y sont pour beaucoup. Ce sont eux qui emmenaient la manifestation et qui donnaient le ton, en particulier le maire de Noyelles-Godault, Jean Urbaniak, " indépendant ", mais visiblement pas si indépendant que cela du ministre Delevoye.
Pourtant, la première urgence serait d'assurer les salaires et les retraites des quelque 2 000 travailleurs, avec les emplois induits, qui se retrouvent sans rien. " L'État a les moyens de faire respecter la loi ". Il peut " saisir les comptes bancaires des entreprises " et " les poursuivre, y compris en dehors du territoire national " a déclaré François Fillon, ministre des Affaires Sociales. Ce ministre ne croit pas un mot de ce qu'il a déclaré, mais c'est pourtant cela qu'il faudrait que les travailleurs imposent, d'autant plus qu'avec tous les licenciements actuels, les dizaines de milliers de travailleurs concernés représentent une véritable force si elle se mobilise.
Les autres usines du groupe en France étant de toutes petites unités où il n'y a pas grand-chose à saisir, il faudrait taper plus haut. Mais la justice se donne rarement les moyens d'être efficace en la matière, d'autant que les sièges sociaux des actionnaires sont en Suisse ou dans d'autres paradis fiscaux.
Alors il faut imposer que l'État prenne le relais, que les ministres bloquent les subventions qui devaient être versées aux patrons et payent plutôt les travailleurs !
La colère collective des dizaines de milliers de travailleurs licenciés, ou menacés de licenciement, devrait s'exprimer avec force, afin de faire vraiment peur à la fois au gouvernement et aux patrons. C'est possible, car la solidarité avec les travailleurs de Metaleurop est évidente, dans toute la région. Et c'est pareil dans toutes les régions où les patrons procèdent à des licenciements, du Nord au Sud du pays.
Qui peut dire qu'il a un emploi stable, qu'il ne sera pas menacé de licenciement dans quelques mois ? C'est pour cela qu'en plus des travailleurs de Metaleurop et de toutes les entreprises qui licencient en ce moment, de nombreux salariés se mobiliseraient, dans le privé, comme dans le public.
Ce n'est pas facile, les syndicats n'y aident pas, les grands partis politiques freinent. Les responsables CGT, majoritaires dans l'usine, n'ont même pas fait un seul tract d'information ni organisé une seule assemblée générale... douze jours après l'annonce du lâchage de l'usine par les actionnaires.
Les politiciens locaux essaient de faire croire aux travailleurs qu'ils vont oeuvrer pour eux. Ce sont pourtant ces mêmes politiciens qui se sont aplatis devant les patrons de Metaleurop, qui les ont laissés polluer gravement toute la zone, même si les rejets ont été un peu réduits ces dernières années, qui ont toléré une insécurité qui a fait de nombreux morts et blessés. A l'époque, ils disaient qu'il ne fallait pas faire fuir les capitaux de Metaleurop... mais les capitaux ont fui quand même, le chômage atteint des sommets, le plomb va rendre invalides de nombreux enfants et il faudrait encore écouter les conseils de ces gens-là !
Non, ça suffit ! Il faut que les travailleurs se donnent les moyens de se défendre eux-mêmes.