La fable des armes qui ne tuent pas19/06/20242024Journal/medias/journalnumero/images/2024/06/une_2916-c.jpg.445x577_q85_box-0%2C7%2C1262%2C1644_crop_detail.jpg

Leur société

La fable des armes qui ne tuent pas

Le gouvernement français, qui cherche à marquer une certaine distance, toute symbolique, vis-à-vis du massacre perpétré par l’armée israélienne à Gaza, a annulé la participation d’entreprises israéliennes au salon de l’armement Eurosatory, une décision suspendue ensuite par la justice.

Ce geste, qui ne change rien aux ventes d’armes, permet d’alimenter la fable du bon emploi des armes. Ainsi, lorsque deux médias, Marsactu et Disclose, révélèrent en mars qu’une entreprise française, Eurolinks, fournissait des pièces d’artillerie à l’armée israélienne, le ministre des Armées, Lecornu, s’est défendu. Il a expliqué que leur licence les vouait à la réexportation, et ne leur permettait donc pas d’être utilisées contre des civils palestiniens. D’après ses propos, le matériel militaire français vendu à Israël ne serait que défensif : « Jamais d’armement, toujours des petits composants, des roulements à billes, des écrous usinés de manière particulière. C’est notamment le cas de petits composants du Dôme de fer. » Pour un peu, le ministre jurerait que la France n’exporte que des rameaux d’oliviers ! Tout cela est en réalité invérifiable, puisque les contrats militaires en cours sont bien souvent classés secret défense.

La France est récemment devenue le deuxième plus gros exportateur d’armes au monde. Et, contrairement à la légende de l’armement défensif, les engins de mort fabriqués par Dassault, Thales, KNDS et consorts ne sont pas destinés à être rangés dans des arsenaux. Ils ont ainsi été utilisés par l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, leur principal client, lors de la guerre au Yémen. Une guerre qui a fait, d’après l’ONU, des centaines de milliers de victimes parmi la population. L’armée française elle-même en a fait usage, non seulement contre des groupes djihadistes, mais aussi contre des villageois durant l’opération Barkhane au Sahel. Le prétexte était le même que celui utilisé aujourd’hui par Israël : une prétendue lutte contre le terrorisme. Dans les deux cas, il s’agit de maintenir la domination impérialiste sur les peuples. Le soutien français à Israël, comme élément de cette domination, peut d’ailleurs être direct comme cela a été le cas en avril avec la coopération militaire pour riposter aux frappes iraniennes.

Lecornu peut d’autant mieux se payer le luxe de parler du prétendu caractère inoffensif des livraisons militaires à Israël qu’elles semblent limitées, en comparaison avec celles en provenance des États-Unis ou même d’Allemagne. Mais si c’est le cas, il n’y est pour rien car les producteurs d’armes vendent à qui achète, au gré du marché, ce qui est considéré comme des marchandises comme les autres.

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