Brève
Suisse : le patronat veut faire payer les soubresauts monétaires aux travailleurs
La société bâloise Straumann, l'un des leaders mondiaux des implants dentaires, prétend être «l'une des sociétés suisses les plus touchées» par la suppression du cours plancher de 1,20 franc pour un euro décidée par la banque centrale suisse le 15 janvier dernier. Elle a donc benoîtement déclaré il y a deux semaines qu'elle allait payer les salaires de ses employés frontaliers en euros. Pour faire passer la pilule, elle a annoncé que chacun ferait des efforts... y compris le directeur, dont le bonus sera, rendez-vous compte, réduit de 35 %.
A l'été 2011, juste avant l'introduction du cours plancher, alors que le franc suisse frôlait déjà la parité avec l'euro, plusieurs entreprises suisses avaient tenté de payer les salaires de leurs frontaliers en euros. Quelques travailleurs avaient refusé, et les patrons concernés, attaqués en justice par des syndicats, avaient été condamnés et avaient dû faire marche arrière.
Aujourd'hui, Straumann n'est pas un cas isolé : à entendre de nombreux patrons suisses, dans le Jura, à Neuchâtel, mais aussi à Zurich, la suppression du cours plancher - qui n'était tout de même rien d'autre qu'une subvention aux exportateurs suisses par la banque centrale - semble le pire des cauchemars... et les licenciements, la baisse des salaires, ou leur paiement en euros, la solution toute trouvée. Or il ne s'agit pas là de PME : Straumann, par exemple, est présent dans 70 pays et a réalisé 523 millions de francs de chiffre d'affaires pour les 9 premiers mois de 2014.
Il faudrait rappeler à ce « beau » monde qu'en période de vaches grasses, ils justifient leurs dividendes et leurs bonus en invoquant le fait qu'ils assument les risques, et notamment le « risque entrepreneurial ». Or le risque de change en fait partie. Ce n'est pas aux travailleurs de payer les conséquences de la spéculation !