Égypte : al-Sissi charme les capitalistes et écrase toute opposition18/03/20152015Journal/medias/journalnumero/images/2015/03/2433.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Article du journal

Égypte

al-Sissi charme les capitalistes et écrase toute opposition

Vingt-deux chefs d’État, dont une belle brochette de cheiks du Golfe, des milliers de participants, 36 milliards de dollars de contrats, des projets pharaoniques, dont une nouvelle capitale administrative grande comme douze Manhattan : la conférence économique internationale organisée par le gouvernement égyptien à Charm el-Cheikh a consacré le maréchal al-Sissi en défenseur des intérêts capitalistes, des investisseurs comme on dit, dans la région.

Après son positionnement en chef de croisade antidjihadiste, en riposte à l’assassinat d’Égyptiens coptes en Libye, après son geste de bonne volonté envers la bourgeoisie française par la commande des Rafale, al-Sissi lance à présent une opération de charme pour garantir aux capitalistes d’Occident, d’Arabie saoudite, des Émirats et du Koweït la rentabilité future de leurs investissements.

Moins de deux ans après le coup d’État qui a permis à l’armée de reprendre directement les rênes du pouvoir, le président al-Sissi a rétabli en Égypte une dictature qui s’emploie à faire taire toute opposition politique, qu’elle émane des Frères musulmans ou de la gauche dite laïque, et réprime toute manifestation ouvrière, s’appuyant sur un arsenal de lois et sur une police sans scrupule. Élu président en mai 2014, al-Sissi ne semble guère pressé d’organiser des élections législatives, alors que le Parlement est dissous depuis juin 2012, sous la présidence de l’islamiste Mohamed Morsi.

S’étant fixé pour but de rétablir une certaine stabilité dans ce pays d’environ 90 millions d’habitants, al-Sissi a fait mine de s’appuyer sur l’important sentiment de rejet qu’avait suscité le gouvernement des Frères musulmans, appuyés par le parti salafiste al-Nour, pour rétablir – et au-delà – la poigne de fer qui tentait de faire taire les revendications ouvrières et démocratiques sous Moubarak, avant janvier 2011. À aucun moment, depuis la chute du dictateur, aussitôt remplacé par le Conseil suprême des forces armées, les revendications de « pain, liberté, justice sociale » n’ont connu un début de satisfaction et, si de nombreux syndicats libres ont pu se créer, il reste toujours aussi difficile aux militants ouvriers de les imposer face à l’arrogance des syndicats officiels, marchant main dans la main avec les patrons privés et les directeurs d’entreprises publiques, et bénis par les autorités locales.

Quant aux travailleurs qui font grève ou manifestent, que ce soit pour obtenir le versement de salaires en retard, l’embauche, ou tout simplement pour ne pas être jetés à la rue, ils se font traiter de Frères musulmans et, en tant que tels, risquent les coups, l’arrestation, voire pire.

On voit qu’il n’est nul besoin de la nouvelle loi « sur les entités terroristes » récemment décrétée pour que le pouvoir militaire s’attaque à tous ceux qui tentent de s’opposer à lui.

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