États-Unis : Musk accro à l’argent public12/03/20252025Journal/medias/journalarticle/images/2025/03/P10-1_Musk_OK_Lupo.jpg.420x236_q85_box-0%2C77%2C798%2C525_crop_detail.jpg

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Musk accro à l’argent public

Aux États-Unis, nul ne peut ignorer les vantardises quotidiennes d’Elon Musk, qui met en scène une lutte contre les déficits publics en coupant dans les dépenses de l’État qu’il juge inutiles.

Illustration - Musk accro à l’argent public

Le site Internet du Doge, son « département de l’efficacité gouvernementale », affiche les milliards de dollars que Musk et son équipe sont censés permettre au contribuable américain d’économiser en mettant des employés fédéraux au chômage et en fermant des agences gouvernementales. Mais Musk est beaucoup plus discret sur ce que ses succès en tant qu’entrepreneur ont coûté au fil des années en argent public. Le quotidien Washington Post, propriété d’un autre milliardaire, Jeff Bezos, certainement jaloux de la proximité actuelle de Musk avec Trump, a justement publié une enquête sur les aides dont Tesla et SpaceX, les deux principales entreprises de Musk, ont bénéficié.

En 2008, au moment où Telsa commençait à produire sa première voiture, un modèle sport dont seulement quelques milliers d’exemplaires ont été fabriqués, Musk a sollicité un prêt de 465 millions de dollars à l’Agence de l’environnement (EPA) au motif qu’il développait des véhicules électriques. Après l’intervention personnelle de la présidente de cette agence, Tesla a obtenu en 2010 cette aide cruciale, lui permettant de lancer son premier succès à l’échelle industrielle, le Model S, et d’enregistrer en 2013 ses premiers bénéfices trimestriels. Comme l’a expliqué un cadre de Tesla : « Ce prêt était critique, à un moment critique. (…) Sans cela Tesla n’aurait pas survécu. »

Depuis 2014, Tesla a aussi capté une bonne part des droits que l’État fédéral crédite aux constructeurs automobiles produisant suffisamment de voitures électriques, qu’ils peuvent revendre aux constructeurs qui n’en produisent pas assez à côté de leur production de voitures thermiques. Un tiers des profits de Tesla provient de cette manne publique, soit 11,4 milliards de dollars en dix ans. Ces crédits lui ont même permis de continuer à faire des bénéfices en 2020 lorsque la crise du Covid a fait chuter drastiquement les ventes de voitures.

Tesla a également bénéficié pendant des années des 7 500 dollars de bonus écologique accordés par le gouvernement pour chaque voiture électrique vendue. À présent que Tesla domine le marché américain, Musk veut la fin de ces aides, « ce qui sera dévastateur pour nos concurrents », dit-il. De même, il veut réduire de 65 % le budget de l’EPA, qui avait accordé à Tesla son premier prêt, pour qu’aucun autre capitaliste ambitieux ne puisse se lancer, sous couvert de défense de l’environnement, sur les traces de celui qui est devenu l’homme le plus riche du monde.

Tesla n’a pas bénéficié seulement d’aides du gouvernement fédéral : l’État de New York lui a versé 750 millions de dollars pour construire une usine et celui du Nevada, 3 milliards !

SpaceX, autre entreprise- phare de Musk, n’existerait pas non plus si, au travers de la NASA, l’argent public ne l’avait pas irrigué. L’actuelle PDG de SpaceX l’a reconnu en déclarant : « Il y a tout autant de la NASA qu’il y a de SpaceX » dans ces fusées.

En tout le capitaliste Musk aura reçu au moins 38 milliards de dollars d’argent public, et 11,8 milliards sont encore à venir dans les cinq prochaines années. Cela n’inclut pas ses contrats d’armement avec le Pentagone, dont les montants sont secrets.

Tous comptes faits, le jeune entrepreneur talentueux du mythe habituellement servi pour justifier la propriété capitaliste ressemble plus à un impotent appuyé en permanence sur la béquille étatique. En étant le plus proche possible du pouvoir, Musk ne fait qu’appliquer une leçon qu’il a apprise il y a longtemps : l’art de transformer l’argent public en profit privé.

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