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Article du mensuel
Situation intérieure
Une saison renouvelée du cirque politicien
Réélu à la présidentielle, Macron n’a pas obtenu de majorité absolue lors des législatives, ce qui le conduit à user de toutes les ficelles inventées par les concepteurs de la Constitution en vigueur pour faire adopter les lois exigées par le grand patronat. N’ayant pas réussi à rallier les députés LR, le gouvernement Borne alterne entre recherche d’une majorité de circonstance et passage en force avec le recours à l’article 49.3.
À partir du moment où il s’agit de textes budgétaires, l’utilisation du 49.3 est illimitée. Après deux mois de session parlementaire, Borne y a déjà recouru à quatre reprises, engageant à chaque fois la responsabilité du gouvernement. Le scénario est rodé : le gouvernement présente son texte ; les partis d’opposition proposent une batterie d’amendements et crient victoire quand quelques-uns sont votés ; grâce au 49.3, le gouvernement impose un vote bloqué sur son texte ; s’ensuit le dépôt des motions de censure de La France insoumise et du RN, condamnés à l’impuissance puisque les Républicains refusent d’y joindre leurs voix.
Dans les prochains mois, ce jeu d’équilibriste va se compliquer, l’usage du 49.3 étant, hors textes budgétaires, limité à un recours par session parlementaire. Le soutien des députés de droite sera alors nécessaire. En agitant la menace de la dissolution, Macron espère mettre les députés au pas, ceux de sa propre majorité qui montrent quelques velléités frondeuses et surtout les députés LR, souvent élus sur le fil et qui n’ont aucune envie de retourner devant les électeurs. Dans ce poker menteur où la majorité gouvernementale et la droite chassent sur le même terrain, personne n’est à l’abri d’un accident. Même si la dissolution est une arme à double tranchant, comme la droite l’avait appris à ses dépens sous Chirac en 1997, Macron semble l’envisager sérieusement.
Pour l’heure, chaque député joue son rôle et assure le show, dans l’hémicycle ou à la tribune. Les ambitieux se jettent sur les polémiques les plus basses et artificielles, parfois contre leur propre camp. Dernièrement, un député du RN particulièrement décomplexé s’est fait connaître en lançant à un député noir « Qu’il retourne en Afrique ! » Au-delà de la bassesse du débat politicien, le spectacle joué à l’Assemblée nationale est le reflet de l’économie en crise et du désarroi, tant de la bourgeoisie que de son personnel politique.
Le Parlement n’a jamais été rien d’autre que le paravent derrière lequel s’abrite le pouvoir de la grande bourgeoisie. Celle-ci en a fait une opérette, destinée à amuser le public, à dissimuler la réalité du pouvoir et à faire croire aux masses qu’à travers les élections, elles décident de la politique du pays. Pour ce faire, la bourgeoisie a trouvé l’accord de tous les partis politiques, qu’ils soient les défenseurs ouverts du capitalisme ou qu’ils le critiquent, comme les partis réformistes se réclamant de la gauche ou de l’écologie.
Ces derniers contribuent, comme l’extrême droite, à véhiculer l’illusion de la souveraineté du peuple. Cette illusion électoraliste a désorienté et démoralisé le monde du travail, car les espoirs placés dans les candidatures d’un Mitterrand, d’un Jospin ou d’un Hollande ont toujours été déçus. Ceux qui sont placés dans Mélenchon le seront tout autant.
Le jeu parlementaire de la Nupes et du RN
Fruit d’une alliance entre LFI, le PS, le PCF et EELV, négociée à la faveur d’un scrutin majoritaire, la Nupes compte 142 députés. Depuis les élections législatives, LFI présente ce coup politique comme une progression de la gauche. L’illusion d’optique se dissipe avec l’analyse des véritables rapports de force électoraux : en juin, la Nupes n’a pas recueilli plus de voix que les partis qui la composent n’en avaient obtenu en 2017, alors qu’ils se présentaient séparément. Malgré cela, les députés de la Nupes continuent de fanfaronner. En juin, Quatennens, alors étoile montante de LFI, expliquait que « Macron n’a pas de majorité pour appliquer par exemple la retraite à 65 ans, ou le travail en contrepartie du RSA ». La poudre aux yeux n’a jamais été une arme de combat pour les opprimés.
La stratégie de Le Pen est tout autre. Portée par son succès électoral et la droitisation de la société, elle se pose en « force tranquille » qui attend son heure. Elle veut démontrer à la bourgeoisie que son parti est prêt à gouverner, en refrénant, avec plus ou moins de succès, les élans racistes de son camp et en mettant en avant des profils « technos » disposés à prendre une part active aux travaux de l’Assemblée. Avec 89 sièges, le RN continue de tisser sa toile au sein de la haute administration et des organes étatiques que sont la police et l’armée.
Il existe toujours une mouvance identitaire capable d’entreprendre des actions provocatrices, violentes et ouvertement racistes. La campagne présidentielle de Zemmour a donné de l’écho aux idées réactionnaires les plus débridées et a sans doute conforté cette mouvance. Mais, souvent issue des beaux quartiers, elle restera marginale tant qu’il n’y aura pas de radicalisation sociale des catégories petites-bourgeoises. Pour l’heure, celles-ci patientent derrière Le Pen.
Le Rassemblement national peut déjà se targuer d’influer sur la vie politique. La gauche et les macronistes s’accusent réciproquement de faire le jeu du RN en mêlant leurs voix aux siennes, mais ils ne sont pas gênés de piocher dans certaines de ses formulations et même de reprendre certaines de ses idées. C’est le cas de Macron qui a récemment repris à son compte le lien entre immigration et délinquance. Que Darmanin planche sur la régularisation de quelques milliers de travailleurs sans-papiers pour répondre aux demandes patronales n’empêche pas le gouvernement de durcir sa politique contre les immigrés et de contribuer au climat xénophobe et nationaliste.
La politique de Macron, tâtonnante, mais loyale envers ses commanditaires bourgeois
Le maître mot de la politique de Macron est le pragmatisme. Façon de dire qu’il s’adaptera et louvoiera pour pallier la faiblesse de sa majorité. Façon aussi de justifier par avance les fluctuations et les retournements de sa politique. L’aspect chaotique de la gouvernance de Macron – changement de pied sur le nucléaire et la nationalisation d’EDF par exemple – s’explique par le chaos de la société capitaliste soumise aux lois du marché et de la concurrence et, maintenant, aux incertitudes et aux risques engendrés par la guerre en Ukraine.
La bourgeoisie française, comme toutes les autres, est confrontée à une crise multiforme qui bouleverse, voire compromet les bases sur lesquelles elle prospère depuis des décennies, tout en ouvrant de nouvelles opportunités aux capitalistes les plus puissants. Modifications des rapports de force entre capitalistes et des équilibres au sein de l’Europe, bouleversements dans le commerce international, changements des sources d’approvisionnement, adoption de nouvelles technologies… la situation est de plus en plus instable.
Macron ne peut maîtriser une situation que nul ne peut maîtriser mais la bourgeoisie lui conserve sa confiance. La petite bourgeoisie lui est reconnaissante du « quoi qu’il en coûte » assuré pendant les confinements. Quant à la grande bourgeoisie, elle ne peut que saluer la détermination qu’il met à s’opposer à toute nouvelle forme de taxation des profits.
Fidèle à ses commanditaires, Macron maintient son cap antiouvrier : les travailleurs devront se sacrifier pour que la bourgeoisie, à commencer par la plus puissante, tire son épingle du jeu, malgré la guerre, l’inflation galopante, le redressement des taux d’intérêt et la récession qui s’installe. Un des aspects les plus importants de la lutte de classe actuelle est la question de l’indexation des salaires sur les prix. Macron s’y oppose résolument et aide les exploiteurs à accroître la plus-value qu’ils extorquent à leurs salariés en appauvrissant le monde du travail. En remettant à l’ordre du jour son attaque sur les retraites, Macron ouvre un autre front. Il veut à la fois augmenter le nombre d’années de cotisation pour une retraite à taux plein, et porter l’âge légal de départ à 64 ou 65 ans. Il franchirait donc la ligne rouge fixée par la très arrangeante CFDT. C’est une façon d’afficher sa détermination face au front syndical et aux mobilisations.
Du côté des travailleurs
Les travailleurs prennent la mesure du recul de leur pouvoir d’achat. Ils réalisent que cela va durer et s’aggraver parce que la crise s’approfondit et accule des petites entreprises à la faillite. Par des débrayages ou des grèves, ils cherchent le meilleur moyen de se défendre. C’est cet état d’esprit que la CGT cherche à capitaliser. Elle multiplie les journées d’action, reprend les initiatives des secteurs les plus combatifs, ce qui a le mérite de leur donner satisfaction, tout en laissant les autres ne rien faire. Là où la vapeur s’est accumulée, comme dans le secteur des raffineries secoué par des grèves en septembre et octobre, elle peut se dissiper sans risques. Pendant que la CFDT vante les vertus de la négociation et s’oppose aux grèves, la CGT affiche d’autant plus de combativité et de radicalisme qu’elle ne redoute pas d’être débordée.
Si la CGT s’assure la réputation du syndicat le plus combatif, elle n’offre pas de perspective à une mobilisation qui se cherche. Cela nécessiterait de présenter un plan de bataille aux travailleurs en commençant par expliquer la profondeur de la crise dans laquelle nous nous enfonçons et l’offensive féroce de la bourgeoisie qui en résulte. Cela nécessiterait de présenter une stratégie, avec des objectifs de revendications et d’actions pour unir les forces des travailleurs dans une seule et même contestation. Défendre un tel plan de combat est à la hauteur d’une confédération comme la CGT. Elle ne le fait pas parce qu’elle ne le veut pas.
La politique des militants communistes révolutionnaires
Dans le climat de mécontentement actuel, les communistes révolutionnaires doivent être les plus résolus et les plus combatifs. Mais notre propagande ne doit pas se borner à des appels répétés et permanents à la mobilisation. Le plus important est de faire réfléchir et de préparer les travailleurs à la lutte nécessaire pour inverser le rapport de force avec le patronat. Il est possible de le faire en discutant des revendications à mettre en avant et de la façon de diriger les luttes.
Les mêmes revendications peuvent être défendues de manière réformiste ou révolutionnaire. La France insoumise a déjà fait du mot d’ordre d’indexation des salaires une proposition de loi, véhiculant l’illusion qu’il ne s’agirait, une fois de plus, que d’une question de majorité parlementaire. Quand il s’agit de définir quelle augmentation de salaire mettre en avant, deux logiques de classe s’opposent. La première est de raisonner en fonction de ce que le patronat est prêt à lâcher étant donné sa prétendue situation financière et la conjoncture, ce qui revient à raisonner du point de vue patronal. La seconde est de partir de ce qui est nécessaire aux travailleurs pour vivre et revendiquer en conséquence.
Nos tâches restent celles que Trotsky définissait dans le Programme de transition : « La tâche stratégique de la prochaine période – période pré-révolutionnaire d’agitation, de propagande et d’organisation – consiste à surmonter la contradiction entre la maturité des conditions objectives de la révolution et la non-maturité du prolétariat et de son avant-garde (désarroi et découragement de la vieille génération, manque d’expérience de la jeune). Il faut aider les masses, dans le processus de leurs luttes quotidiennes, à trouver le pont entre leurs revendications actuelles et le programme de la révolution socialiste. Ce pont doit consister en un système de REVENDICATIONS TRANSITOIRES, partant des conditions actuelles et de la conscience actuelle de larges couches de la classe ouvrière et conduisant invariablement à une seule et même conclusion : la conquête du pouvoir par le prolétariat.
Pour la social-démocratie […] entre le programme minimum et le programme maximum, il n’y avait aucun pont. La social-démocratie n’a pas besoin de ce pont, car de socialisme, elle ne parle que les jours de fête. L’Internationale communiste est entrée dans la voie de la social-démocratie à l’époque du capitalisme pourrissant, alors qu’il ne peut plus être question de réformes sociales systématiques ni de l’élévation du niveau de vie des masses ; alors que la bourgeoisie reprend chaque fois de la main droite le double de ce qu’elle a donné de la main gauche (impôts, droits de douane, inflation, « déflation », vie chère, chômage, réglementation policière des grèves, etc.) ; alors que chaque revendication sérieuse du prolétariat et même chaque revendication progressive de la petite bourgeoisie conduisent inévitablement au-delà des limites de la propriété capitaliste et de l’État bourgeois. »
Sans un noyau de travailleurs déterminés à se battre pour que la grève soit dirigée démocratiquement par les grévistes eux-mêmes, la remontée de la combativité ouvrière sera conduite sur une voie de garage par les chefs syndicaux. Comme en 1936, en 1947 ou en 1968, si une vague de grèves déferlait demain sur le pays, les forces politiques les plus influentes dans le monde du travail se battraient pour les récupérer et les détourner sur le terrain parlementaire.
LFI aimerait remplacer le PCF en tant que porte-parole du mouvement social. Mélenchon appelle à de grands rassemblements populaires, comme le 16 octobre dernier, pour faire, dit-il des démonstrations de force. À l’exemple du PCF, il prône le combat dans la rue comme dans les urnes, mais sans avoir l’implantation dans la classe ouvrière que le PCF a héritée du passé. Les députés LFI se déplacent sur les piquets de grève et relayent les revendications ouvrières. Dans le vide militant actuel et en l’absence de parti ouvrier révolutionnaire, nombre de travailleurs peuvent se sentir représentés par ce parti.
Aujourd’hui, les salariés sont affaiblis par la division des organisations syndicales et leur concurrence permanente. Même quand elles défendent fondamentalement la même politique, les confédérations doivent justifier leur existence séparée en se distinguant par des revendications et des appels différents. Cette division existe aussi sur le plan politique puisque la classe ouvrière s’éparpille dans les abstentions et se divise, pour ne pas dire s’oppose, entre le vote pour la gauche qui leur semble la plus radicale et celui pour l’extrême droite.
Quand la combativité ouvrière sera de retour, aucune organisation syndicale ou politique ne pourra prétendre rallier tous les travailleurs derrière son drapeau. Le seul moyen d’unir tous les combattants est d’assurer la démocratie au travers de larges assemblées quotidiennes et de comités de grève permettant à tous les travailleurs, y compris à cette écrasante majorité de non-syndiqués, de prendre des responsabilités dans l’organisation et la direction de la grève.
La démocratie ouvrière est fondamentale pour unifier les travailleurs dans un mouvement d’ensemble. Pour les communistes révolutionnaires, elle est plus qu’un principe. Elle constitue la condition indispensable au combat des travailleurs pour se défendre au jour le jour et faire l’apprentissage de leur pouvoir collectif. Elle est au cœur même du combat politique de tous ceux qui sont restés fidèles à la perspective tracée par l’AIT et par Marx : « L’émancipation des travailleurs sera l’œuvre des travailleurs eux-mêmes. »
Sans être communistes révolutionnaires, bien des travailleurs sont attachés à la démocratie ouvrière. C’est d’autant plus vrai que la méfiance vis-à-vis des appareils syndicaux a grandi. Celle-ci s’est largement exprimée lors du mouvement des Gilets jaunes. Mais cette démocratie n’en est pas moins un combat. Le noyau de travailleurs convaincu de son importance doit être formé avant même que la grève se déclenche. Faire émerger ce noyau et le renforcer doit être un des objectifs immédiats des révolutionnaires.
Dans le cadre d’un mouvement déterminé, un noyau de travailleurs peut suffire à convaincre des travailleurs réunis en assemblée générale qu’ils doivent mettre en place un comité de grève élu démocratiquement par tous les grévistes. Si de tels comités de grève surgissent dans de grandes entreprises, ils peuvent se transformer en organisation pour tous les travailleurs de la zone industrielle ou de la ville, qu’ils soient d’une petite ou d’une grande entreprise, ou chômeurs ou retraités.
Seuls la profondeur du mouvement et son radicalisme peuvent amener à déborder les appareils préparés à encadrer les travailleurs. Mais il n’y a pas à faire de pronostic quant à l’évolution de la combativité et encore moins à se demander si les révolutionnaires feront le poids dans une période de radicalisation de la classe ouvrière. Ils ont à défendre les perspectives qui peuvent offrir une issue politique favorable à une remontée ouvrière, les perspectives communistes révolutionnaires.
Quand Trotsky écrivait dans le Programme de transition que « La situation politique mondiale dans son ensemble se caractérise avant tout par la crise historique de la direction du prolétariat », l’œuvre destructrice du stalinisme était déjà bien avancée. La dictature stalinienne avait anéanti les meilleurs dirigeants de la classe ouvrière regroupés en Russie au sein de l’Opposition de gauche et elle avait profondément dénaturé et perverti le capital politique révolutionnaire légué par Marx et Lénine. Mais l’objectif de la conquête du pouvoir politique par le prolétariat n’était pas une abstraction pour la génération qui avait assisté aux événements révolutionnaires et à toutes les luttes politiques qui s’étaient déroulés après la Première Guerre mondiale. Même privés de véritable direction politique, de nombreux travailleurs conservaient la perspective révolutionnaire au fond de leur conscience. Plus de quatre-vingts ans plus tard, ce n’est plus le cas que d’une petite minorité.
Depuis que Trotsky a écrit le Programme de transition, les luttes auxquelles les travailleurs ont pris part n’ont pourtant pas manqué. Mais nulle part, ils n’ont pu les mener sur leur terrain de classe, et nulle part ils n’ont pu postuler pour le pouvoir. Cette perspective a partout été tuée dans l’œuf par le courant réformiste, dans ses variantes stalinienne ou nationaliste.
Aujourd’hui, l’idée du renversement de la domination bourgeoise et la conscience que la classe ouvrière doit la remplacer à la tête de la société ont quasiment disparu. Même si les élections ne reflètent que de façon déformée l’état d’esprit des travailleurs, elles indiquent la faiblesse du courant communiste révolutionnaire. À la présidentielle, notre candidate a en effet recueilli 197 141 voix, soit 0,56 %. Aux législatives, nos 554 candidats en ont obtenu 229 810, soit 1,04 %. C’est très faible mais ce fil relie les travailleurs d’aujourd’hui aux révolutionnaires du passé et il est le seul gage que de nouvelles générations s’emparent des idées communistes révolutionnaires.
Même les travailleurs les moins politisés touchent du doigt la faillite des classes dirigeantes. Ils s’interrogent, doutent et s’inquiètent. Ils cherchent des réponses et de nouvelles perspectives. L’extrême droite, les Le Pen, Meloni, Trump ou Bolsonaro, en ont de toutes simples qui répondent aux peurs et flattent les préjugés réactionnaires. Les militants de l’intégrisme religieux en ont d’autres. Dans cette recherche d’idées antisystème, il faut que les travailleurs trouvent sur leur chemin les idées communistes révolutionnaires.
En 1903, dans un texte en hommage à Karl Marx, Rosa Luxemburg se demandait : « Qu’est-ce qui nous donne la force morale intérieure de supporter et de secouer les pires oppressions avec ce courage moqueur qui est le nôtre ? Serait-ce cette ténacité dont font preuve les déshérités dans la recherche d’une petite amélioration matérielle de leurs conditions ? […] Serait-ce, comme au temps des chrétiens primitifs, le stoïcisme ascétique d’une secte, dont l’éclat brille en proportion directe des persécutions subies ? […] Serait-ce, enfin la légitimité de la cause que nous défendons, qui nous rend aussi invincibles ? »
À toutes ces questions, Rosa Luxemburg répondait non. Elle expliquait : « Si le mouvement ouvrier actuel, bravant tous les coups de force du camp ennemi, secoue victorieusement sa crinière, cela est dû principalement à la sereine compréhension des lois de l’évolution historique objective, à la compréhension du fait que « la production capitaliste engendre elle-même sa propre négation avec la fatalité qui préside aux métamorphoses de la nature » (Marx), c’est-à-dire l’expropriation des expropriateurs, la révolution socialiste ; cela tient à cette compréhension dans laquelle il entrevoit la ferme garantie de la victoire finale et à laquelle il vient puiser non seulement sa fougue, mais aussi sa patience, la force d’agir et le courage de persévérer. »
La période actuelle nous donne la possibilité de nous adresser à des travailleurs d’autant plus attentifs qu’ils cherchent des perspectives dans un contexte de plus en plus inquiétant. Elle nous permet de les regrouper dans les entreprises et de tisser de nouveaux liens politiques et organisationnels avec eux. Elle nous offre des opportunités pour nous renforcer et recruter. À nous de les saisir.
11 novembre 2022