- Accueil
- Lutte ouvrière n°2163
- Référendum en Guyane et Martinique : Victoire du non
Article du journal
Référendum en Guyane et Martinique
Victoire du non
En Guyane comme en Martinique, les électeurs étaient appelés le 10 janvier à se prononcer par référendum sur un changement de statut qui leur aurait donné une plus grande autonomie. La Guadeloupe n'était pas concernée, les élus locaux ayant demandé au gouvernement un délai de dix-huit mois avant d'organiser une telle consultation.
Les électeurs se sont massivement prononcés en faveur du non, par 69,8 % des voix en Guyane et 79,60 % en Martinique. Le rejet du changement de statut est d'autant plus significatif que la participation atteint un taux de plus de 49 % en Guyane et de 55 % en Martinique, ce qui traduit une forte mobilisation de la population, traditionnellement peu attirée par les urnes.
La conséquence de ce vote est qu'une seconde consultation sera organisée le 24 janvier. Elle portera, cette fois, sur la fusion en une Assemblée unique des Conseils généraux et régionaux de ces deux départements.
En Martinique, au fil des jours, il semblait bien que les tenants du oui à l'article 74 de la Constitution, proposant plus d'autonomie, ne réussiraient pas à entraîner l'adhésion de la population. Ces partisans de l'article 74 étaient regroupés dans le Rassemblement martiniquais pour le changement (RMC), avec le Mouvement indépendantiste martiniquais (MIM) parti d'Alfred Marie-Jeanne, président de la région, le Rassemblement démocratique de Martinique (RDM), parti de Claude Lise, président ex-PPM du Conseil général, le Modémas, mouvement du souverainiste et écologiste Garcin Malsa, Bâtir le pays Martinique du maire du Lamentin ainsi que d'autres, parmi lesquels 14 maires sur les 34 que compte l'île.
Des échos venant des travailleurs et des milieux populaires indiquaient clairement que ces derniers ne se retrouvaient pas dans les explications données par les partisans du 74, qu'il n'y avait rien de bon pour eux.
Pendant ce temps, les tenants du « non », avec d'un côté la droite de l'UMP et des Forces martiniquaises de progrès, mais aussi le Parti progressiste martiniquais fondé par Aimé Césaire, la Fédération socialiste de Martinique ou d'autres mouvements de la gauche traditionnelle, prenaient de l'assurance.
Néanmoins, au soir du 10 janvier, l'importance du vote non a surpris une grande partie de la classe politique, et en tout premier lieu les tenants du oui.
Sur les quatorze communes où les maires avaient fait campagne pour le oui, seules deux, dont celle de Rivière-Pilote fief de A. Marie-Jeanne, se sont prononcées à une courte majorité pour le oui. Dans les douze autres, la population n'a pas suivi et s'est prononcée pour le « non » dans des proportions identiques voire plus importantes que le reste de la Martinique.
De façon générale ces élus, qui avaient fait mine de se réclamer des mobilisations de février 2009 pour présenter à la population leur recette statutaire, ont été bel et bien désavoués.
Lors de la soirée électorale, les leaders du oui, tels le président de la région, Marie-Jeanne, ou celui du département, C. Lise, ont déclaré que « la seule perdante, c'est la Martinique » et aussi que la population avait réagi, cette fois encore, par un « réflexe de peur ».
La droite, de son côté, se frottait les mains.
Quant au PPM du député-maire de Fort-de-France Serge Letchimy, dans une déclaration officielle, il s'est dépêché de se mettre aux avant-postes, se félicitant de cette « victoire du peuple » et de ce qu'il qualifie de « vote de la sagesse » et appelant sans exclusive « tous les enfants de la Martinique » à se retrouver pour un changement... en votant oui à l'Assemblée unique... dans le cadre de l'article 73, lors de la consultation du 24 janvier prochain.
Ghislaine Joachim-Arnaud, dirigeante de Combat Ouvrier, a pour sa part fait parvenir une déclaration à la presse, indiquant notamment : « La méfiance de la majeure partie des travailleurs et de la population pauvre envers les politiciens a été plus forte que leur désir de donner naissance à un statut avec plus de pouvoir de décision local.
Tous ces politiciens n'ont qu'à s'en prendre à eux-mêmes ! C'est leur refus de s'engager sur quoi que ce soit concernant les intérêts des couches laborieuses et pauvres qui a créé la méfiance ; et leurs silences sur les problèmes importants n'ont fait qu'alimenter cette méfiance.
Nous, Combat Ouvrier, n'avions donné aucune consigne de vote, car nous ne voulions pas cautionner les actes passés, présents ou futurs de politiciens qui se moquent bien des intérêts et des aspirations des travailleurs. Cette consultation était un faux choix ! »
Elle poursuit sur le vote du 24 janvier : « Ce qui sera voté pour la deuxième phase de ce référendum - le 24 janvier - ne changera pas non plus grand-chose, que l'assemblée unique soit votée ou non.
Nous ne donnerons pas plus de consigne de vote !
Et en effet aucun changement, ou non, de statut n'apportera de satisfaction aux problèmes et aux revendications des travailleurs. La voie prise en février et mars 2009, la grève générale, les luttes dans les entreprises, sont les seuls moyens qui leur permettront de changer leur situation.
Quant au pouvoir en place, il aurait bien tort de tirer satisfaction de ces résultats, car le rejet des politiciens locaux en tout genre et de leurs projets ne signifie pas - loin de là - que la population veut confier son sort aux gouvernants qui ne cessent d'aggraver ses conditions de vie par des attaques contre les services publics, contre les retraites, contre les emplois, avec un chômage record en Martinique. »