« L'impôt saigne le malheureux » (l'Internationale)31/10/20132013Journal/medias/journalnumero/images/2013/11/une2361.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Article du journal

« L'impôt saigne le malheureux » (l'Internationale)

Le pays sera-t-il privé de foot pendant tout un week-end ? Voilà l'angoissante question qui a préoccupé la presse la semaine dernière, devant la menace de grève des footballeurs professionnels. Mais attention : la menace ne vient pas des footballeurs du rang, des fantassins du football professionnel. Elle ne vient pas non plus de ses enfants gâtés, ces quelques dizaines de stars qui gagnent en un an l'équivalent de 500 ou de 1 000 années de smic !

Non, la menace de grève émane des présidents et des actionnaires de ces entreprises de spectacle que sont les grands clubs vedettes.

La raison : la taxe que ces clubs devront payer pour leurs joueurs, entraîneurs et dirigeants qui touchent plus d'un million d'euros par an. Un projet qui soulève tant d'indignation dans ce milieu que Hollande a éprouvé le besoin de les recevoir à l'Élysée dans les jours qui viennent.

« Cette taxe est totalement inique et scandaleuse », déclare Michel Seydoux, président du club de Lille. Et d'ajouter : « On veut taxer les pauvres à la place des riches ! » L'indignation ne manque pas de sel, venant d'un homme qui fait partie d'un des plus riches clans bourgeois, héritier Schlumberger et grand patron dans la production cinématographique !

Les autres présidents de club qui ont voté à l'unanimité pour mettre leurs footballeurs en grève sont du même acabit. Sans parler de l'émir du Qatar, propriétaire du PSG, d'un des plus riches oligarques russes, propriétaire de Monaco, les autres sont pour la plupart issus de ces grandes familles bourgeoises qui achètent un club de foot et ses joueurs comme leurs grands-pères achetaient un haras avec des chevaux de course. Tel par exemple feu Robert Louis-Dreyfus, une des grandes fortunes mondiales, acquise grâce à la spéculation sur les produits alimentaires, qui avait acheté l'OM. Et parmi les propriétaires de ces clubs si « pauvres », il y a Peugeot pour celui de Sochaux, Pinault pour Rennes.

Face à ce lobby du football, Ayrault a levé le menton pour clamer qu'il ne céderait jamais.

On pourrait rire de ce jeu de rôle entre le gouvernement et le lobby du foot, ou s'en détourner avec dégoût. Mais, bien au-delà de cette mascarade, l'affaire nous concerne. Pendant que les informations se partagent pour ou contre les ligues de foot, le matraquage fiscal continue. Il ne s'agit pas du prétendu matraquage fiscal dont se plaignent les plus riches qui, comme toujours, pleurent la bouche pleine alors qu'ils sont favorisés par le gouvernement, celui en place tout aussi bien, voire plus, que le précédent.

Le véritable matraquage fiscal concerne les classes laborieuses, les salariés y compris les plus pauvres et, plus généralement, tous ceux dans les classes populaires qui vivent de leur travail. Le véritable matraquage fiscal est la hausse au 1er janvier 2014 de la TVA, l'impôt le plus injuste qui soit parce qu'il frappe indistinctement au même taux les millionnaires et les chômeurs ou les SDF.

Le véritable matraquage fiscal, c'est aussi l'ensemble des mesures décidées en douce, qui font que d'un seul coup près d'un million de ménages (petits salariés et retraités) qui ne payaient pas d'impôt sur le revenu sont devenus imposables. Avec les conséquences qui en découlent, comme la perte de certaines allocations et la suppression de l'exemption de la taxe d'habitation.

Et même l'écotaxe, décidée par le gouvernement Sarkozy et reprise par le gouvernement Ayrault, contre laquelle des manifestations ont eu lieu ce week-end en Bretagne : si elle concerne aussi les grosses entreprises, elle frappe surtout les petites et les artisans. Elle sera aussi en fin de compte payée par les consommateurs, sur lesquels la hausse de prix sera répercutée.

On nous dit que tout cela est nécessaire car il s'agit de financer les services publics utiles à tous. La mauvaise blague : dans les services publics, on inclut aussi le coût de l'armée, de l'armement et de toutes les guerres de brigandage menées au Mali ou ailleurs. Et, par les temps qui courent, on paie surtout les cadeaux au grand patronat et les intérêts faramineux que les banques prélèvent sur un État endetté jusqu'au cou... pour avoir, pourtant, emprunté pour aider ces mêmes banquiers.

Alors, la seule politique fiscale juste du point de vue des exploités serait la suppression des impôts indirects, sauf sur des produits de luxe que seule la bourgeoisie achète ; et que l'impôt sur le revenu ne s'applique justement qu'au revenu, c'est-à-dire ce qui est tiré de l'exploitation par le biais du capital.

Un salaire n'est pas un revenu. C'est la rétribution d'un travail réel, rétribution déjà amputée par la plus-value prélevée pour le profit capitaliste.

Éditorial des bulletins d'entreprise du 28 octobre

Partager