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Leur société
Les 35 heures : Une arnaque historique
Le 15 décembre a été définitivement votée la seconde loi Aubry sur les 35 heures. Le soir même au Parlement, après avoir sablé le champagne, Aubry, " heureuse ", a sorti de son sac, pour les dédicacer, des cartes " Oui à la semaine des 35 coeurs ! ". Mais pour qui battent-ils ?
" Grande loi ", " mesure phare du gouvernement ", se gargarise le PS, à qui L'Humanité emboîte le pas en parlant de " réforme-phare de la législature ". Ce qui est sûr, c'est que la gauche avait déjà pas mal fait contre les travailleurs, mais qu'avec cette loi elle aura réussi à rendre la vie d'une majorité de salariés plus dure au quotidien. En effet, la flexibilité est la règle dans la quasi-totalité des accords ou des négociations en cours. Pas étonnant que certaines entreprises aient tendance à délaisser ce qui est qualifié de flexibilité externe, à savoir l'intérim notamment. Avec des périodes hautes qui peuvent faire grimper l'horaire hebdomadaire jusqu'à 44 heures, voire 46 heures suivant l'accord de branche, sur douze semaines consécutives, les patrons disposent d'une marge de manoeuvre considérable. Le travail le samedi se généralise.
Sous prétexte de réduction du temps de travail, les patrons se sont vu octroyer tous les moyens légaux pour remettre en cause les acquis sociaux et faire fluctuer la vie des travailleurs au rythme de l'activité de l'entreprise. Et pourtant, dans la gauche dite plurielle, le soir du vote, il s'est trouvé un pitre, le Vert Yves Cochet en l'occurrence, pour se payer (ça ne lui coûte rien, ce sont les travailleurs qui trinquent) le ridicule de parler de " l'épanouissement gratuit de soi pour la lecture, pour l'art, pour le jeu, pour la réflexion, pour la rêverie, les activités familiales voire même amoureuses "... Il y a donc un épanoui dans cette affaire, satisfait de pouvoir s'épanouir. Grand bien lui fasse !
Quant au chômage, outre que dans la deuxième loi l'obligation d'embauches n'est même plus mentionnée, il est évident qu'il ne risque pas d'être résorbé avec les mesures adoptées. En revanche le rythme du travail s'intensifie, le nombre des tâches effectuées s'alourdit, ce qui ne peut entraîner que des contrecoups néfastes sur la santé des salariés. A l'Assemblée, Aubry a lancé : " Voter contre ce texte, c'est être à contretemps de notre époque ". Comme s'il était normal qu'à l'aube du XXIe siècle, la condition des travailleurs se voie ramenée des décennies en arrière pour que la soif de profits des capitalistes se traduise par le fait que la vie de millions d'hommes soit ainsi gâchée, amputée, méprisée. Sous Mitterrand, la Bourse a été " réhabilitée ", comme il disait, et ceux qui font des fortunes en dormant, célébrés comme des héros modernes. La nouvelle équipe de gauche, derrière son vocabulaire de pacotille sur la réduction du temps de travail, a complété le tableau en se faisant l'instrument d'une des escroqueries antiouvrières du siècle et a su concocter pour les patrons un bon cadeau de Noël pour l'an 2000, eux qui vont en plus bénéficier de dizaines de milliards d'allégements de charges pour mieux exploiter leurs employés. Mais les lendemains de fête douloureux existent aussi car, à trop se croire tout permis, ça fait déborder la coupe qui est déjà bien pleine, comme en attestent les nombreux conflits qui ne cessent d'éclater un peu partout.
Car ces messieurs-dames, tout à leurs embrassades, ne s'interrogent même pas sur le fait que cette loi, qui est censée améliorer les conditions de travail des salariés, provoque tant de conflits. Leur miracle a des ratés qui ne doivent rien au bogue !