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Grande-Bretagne : L'extrême gauche et les élections du 7 juin
Les élections britanniques du 7 juin ont vu une participation sans précédent de l'extrême gauche. Il faut remonter à l'année 1950, où le Parti Communiste se présenta sur une échelle comparable, pour trouver autant de candidats sur la gauche du Parti Travailliste.
La principale formation d'extrême gauche était la Socialist Alliance, une coalition formée par les six principaux groupes révolutionnaires anglais. Elle présentait des candidats dans 98 des 569 circonscriptions d'Angleterre et du pays de Galles. Au total ces candidats ont obtenu 55 635 voix, pour une moyenne de près de 2 %.
Tout en se présentant comme offrant une voix aux travailleurs opposés à la politique de Blair, la démarche de la Socialist Alliance n'était pourtant pas dépourvue d'ambiguïté. La quasi-totalité des circonscriptions où elle s'est présentée ont été choisies de façon à ne pas risquer de porter la responsabilité d'un échec du candidat travailliste, même lorsqu'il s'agissait de villes ouvrières importantes, comme certaines banlieues de Londres. Par ailleurs, elle a choisi de ne pas se présenter contre des députés travaillistes "de gauche" (même s'ils ne se sont jamais opposés à Blair ouvertement). De par ces choix, la Socialist Alliance a agi plus comme une aile critique de la mouvance travailliste que comme un adversaire politique de Blair.
Néanmoins, du fait du monopole traditionnel du Parti Travailliste dans la gauche électorale, le seul fait de se présenter contre les candidats de Blair à une certaine échelle a permis à la Socialist Alliance d'apparaître aux yeux d'une minorité non négligeable comme un moyen d'exprimer son opposition à la politique du gouvernement. Et ses scores sont d'autant plus notables si l'on sait que le Parti Communiste n'a jamais fait plus de 2 % de moyenne nationale dans une élection législative.
Outre la Socialist Alliance, d'autres forces ont également tenté de capter le mécontentement existant sur la gauche du Parti Travailliste, mais sur des bases politiques encore bien plus douteuses.
Ainsi le Socialist Labour Party (SLP) présentait 114 candidats dans l'ensemble de la Grande-Bretagne et a obtenu 57 497 voix, soit environ 1,5 % en moyenne. Le SLP est formé par des militants syndicaux et de l'ex-aile stalinienne du Parti Communiste, autour de l'ancien leader du syndicat des mineurs, Arthur Scargill. Son langage ne se distingue en rien de celui du Parti Travailliste des années 1960, avec en prime un chauvinisme virulent : il revendique en particulier le retrait de la Grande-Bretagne du marché commun et la mise en place de barrières douanières pour protéger l'industrie du pays.
Enfin, en Ecosse, le Scottish Socialist Party présentait des candidats dans l'ensemble des 72 circonscriptions, où il a obtenu un peu plus de 50 000 voix et une moyenne d'environ 4 %. Mais là aussi, il s'agit d'une formation qui, bien qu'issue du trotskysme, a dérivé vers le nationalisme écossais et le réformisme "de gauche".
Il ne fait pas de doute néanmoins qu'une partie des voix qui se sont portées sur le SLP et, dans une moindre mesure peut-être sur le SSP, expriment un vote de censure de la politique de Blair du point de vue des intérêts du monde du travail.
Il faut souhaiter en tout cas que ce vote de censure constitue une étape dans le réarmement politique de la classe ouvrière. Cela peut dépendre des organisations se situant aujourd'hui à la gauche du Parti Travailliste à condition qu'elles fassent le choix de se poser clairement en adversaires politiques sur des bases de classe, aussi bien du Parti Travailliste et du réformisme en général que des impasses nationalistes.