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- Lutte ouvrière n°1730
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Union européenne : Quand le parlement fait mine de s’intéresser au monde du travail, c’est pour défendre… le patronat !
Le Parlement européen s'est réuni à Strasbourg du 4 au 7 septembre derniers. La presse s'est fait l'écho de différents sujets à l'ordre du jour, notamment l'élargissement de l'Union européenne ou encore le système d'espionnage anglo-saxon "Echelon". Les rapports sur les comités d'entreprise des grandes entreprises européennes pouvaient sembler concerner le monde du travail. Mais il n'en était rien.
Même quand le Parlement traite d'un tel sujet, ce n'est même pas un reflet du monde réel. Ainsi, l'un des rapports concernant l'institution d'un comité d'entreprise européen mettait l'accent sur les "impératifs de la concurrence". Les trois députées de Lutte Ouvrière, Arlette Laguiller, Armonie Bordes et Chantal Cauquil, ne pouvaient donc l'approuver : "Nous n'avons pas voulu, par un vote négatif, empêcher ce rapport de passer, pour tenir compte du souhait d'un certain nombre de syndicats. Notre abstention signifie cependant notre désaveu à l'égard de propositions qui, sous prétexte d'élargir les droits des travailleurs, se placent clairement du point de vue des intérêts patronaux. On nous parle d'"impératifs de concurrence" mais on ignore l'impératif qui est d'assurer le droit des travailleurs de vivre et de toucher un salaire. Pour l'auteur du rapport, aider les patrons, c'est un impératif. Par contre, pour ce qui est du droit des travailleurs, il est d'emblée limité au droit d'être informés des licenciements qu'on leur impose, il n'est pas question de les empêcher. Le simple droit de veto est refusé aux comités d'entreprise, alors même que, devant la multiplication des licenciements collectifs, y compris dans les grandes entreprises qui font depuis des années des profits énormes, seule l'interdiction des licenciements pourrait protéger les travailleurs", ont-elles déclaré.
Arlette Laguiller était intervenue sur ce point au cours de la discussion : "En France, on voit bien que, sur toutes les décisions essentielles pour la vie des travailleurs, la décision finale appartient aux patrons. Les comités d'entreprise sont réduits à l'impuissance - comme lors des licenciements inacceptables chez Moulinex, Aventis, Danone et bien d'autres - ou ils sont englués à cautionner les décisions patronales, voire à désigner les victimes des licenciements, comme chez AOM-Air Liberté. Alors, le seul droit qui en serait un pour les travailleurs, c'est celui à l'emploi, ce qui signifie l'interdiction des licenciements, au moins dans les entreprises qui font du profit."
"ECHELON" : BEAUCOUP DE BRUIT POUR RIEN
Le Parlement européen avait fait grand cas du système "Echelon", système d'espionnage anglo-américain. Les systèmes d'espionnage existent dans tous les grands Etats capitalistes. Ce n'est donc pas cela qui embarrassait l'Union européenne, mais le fait que, là encore, les concurrents des entreprises européennes risquaient de découvrir leurs secrets.
Les députées de Lutte Ouvrière ont expliqué qu'elles avaient voté "contre ce rapport, non seulement pour dénoncer ses complaisances à l'égard du système "Echelon", sans le ridicule espoir que le Parlement européen puisse peser sur la décision de ceux qui l'ont mis en place, mais surtout pour dénoncer l'ensemble du système des relations entre Etats, ainsi qu'entre groupes financiers et industriels dont l'espionnage universel n'est qu'une des nombreuses conséquences.
La rivalité entre grandes puissances dans leurs efforts concurrents pour mettre la planète en coupe réglée a pour instrument l'espionnage politique et militaire. Le secret industriel et commercial, prôné par tous les défenseurs de l'ordre capitaliste afin de cacher à leurs propres populations les multiples façons de s'approprier et de gaspiller la richesse sociale, a pour complément inévitable l'espionnage industriel. Toutes ces pratiques, partagées par tous les Etats qui en ont les moyens, sont attentatoires aux libertés démocratiques et aux droits de la personne humaine. Le rapport n'est au fond préoccupé que de protéger les industriels européens."
Autant dire qu'il était dérisoire de la part de certains députés de la Gauche Unitaire Européenne, parmi lesquels Alain Krivine, de chercher, dans une prise de position minoritaire, à améliorer ce rapport en écrivant notamment : "Ce système viole donc de manière flagrante les libertés des citoyens européens, la logique du libre marché et la sécurité de l'Union ; quelle que soit notre appréciation ou opposition à ces logiques et à ces traités, ces violations sont inacceptables."