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- Lutte ouvrière n°1743
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Leur société
La police victime d'un délit de faciès
" Scandaleux et insultant ", s'est récrié Daniel Vaillant, le ministre de l'Intérieur, à l'Assemblée nationale le 4 décembre. Cette indignation ne répondait ni aux multiples déclarations de Seillière, le patron des patrons, ni aux décisions révoltantes des propriétaires de Moulinex, de Bata ou d'autres. Non, l'objet de son courroux, partagé par sa collègue de la Justice, Marylise Lebranchu, était un petit livre rédigé par le Syndicat de la magistrature (donc par ceux qui connaissent la question) et intitulé " Vos papiers ! " Que faire face à la police ? (L'Esprit frappeur, 10 francs).
Loin pourtant de crier " Mort aux vaches " comme l'avait fait en son temps Crainquebille, le héros d'une nouvelle d'Anatole France, écrivain du 19e siècle qui avait ainsi contribué à populariser l'expression, cette brochure ne fait que rappeler, à propos des contrôles d'identité, quelques textes de la loi dont on nous serine que nul n'est censé les ignorer. Ils sont émaillés de commentaires tels que : " N'oubliez pas que le contrôle d'identité, avant d'être régi par des textes de loi, est l'expression d'un rapport de force qui est rarement favorable à la personne qui le subit. On peut même parfois le considérer comme un instrument qui vise à établir un rapport de force favorable aux forces de l'ordre. " C'est le moins que l'on puisse dire.
Sur la couverture figure, il est vrai, un ensemble très coloré représentant le visage tout rose d'un policier doté d'un groin de porc surmontant des lèvres retroussées en une mimique peu amène, bref une caricature ! Il n'y a certes pas là de quoi fouetter un poulet, mais cela n'a pas empêché le Syndicat national des officiers de police d'y voir une " attaque sordide et indigne " et d'engager une action en justice pour obtenir l'interdiction de la couverture. Pas question donc qu'on badine avec les autorités.
Le plus comique sans doute dans cette histoire n'est pas la couverture, c'est de voir des membres d'un gouvernement de gauche qui nous abreuvent de grands mots sur " l'Etat de droit ", " les droits du citoyen ", " les valeurs de la République et de la démocratie " - on en passe et des meilleures - crier à la vertu outragée.