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Leur société
Politiciens et affairistes : Les vases communicants
Francis Mer envisage de nommer un de ses poulains, Jérôme Gallot, dans l'équipe dirigeante de la Caisse des Dépôts et Consignations. Mais la loi interdit ce genre de passage d'un haut fonctionnaire vers une entreprise qu'il a eue sous sa tutelle. Qu'à cela ne tienne ! Francis Mer envisagerait de... modifier la loi sur ce point !
Le rôle principal de l'État étant de servir de béquille aux entreprises, les passages de l'un aux autres sont en fait très fréquents, et la loi qui interdit théoriquement ce qu'on appelle le " pantouflage ", dans l'argot qui a cours dans les milieux de la haute fonction publique et des entreprises, est souvent violée.
Les liens entre l'État et la sphère des affaires sont amplement décrits dans le livre de Olivier Toscer paru récemment aux éditions Denoël : Argent public, fortunes privées. A propos de pantouflage, on nous y raconte par exemple le parcours de Jérôme Monod, qui passa successivement de la tête du RPR à celle de la Lyonnaise des Eaux (et vice versa puisqu'il est redevenu conseiller particulier de Chirac), ou les débuts de Jean-Marie Messier au cabinet d'Édouard Balladur au milieu des années 1980, et la série de cadeaux faits par l'État qui l'ont propulsé à la tête du trust Vivendi.
Ces exemples, et de nombreux autres, mettent en scène ces grands commis de l'État, qui passent de l'administration à l'entreprise : Jean-Yves Haberer, inventeur sous Giscard de l'emprunt qui porte le nom de l'ancien président de la République, puis directeur du Crédit Lyonnais, ou Jean-Charles Naouri, ancien directeur de cabinet de Pierre Bérégovoy, à présent à la tête d'un groupe de la grande distribution.
Il raconte aussi comment Vincent Bolloré, Bernard Arnault ou François Pinault ont constitué leur fortune, parmi les plus grandes de France, à coups de cadeaux fiscaux et d'aides publiques, de ventes d'entreprises à prix préférentiels ou de remises d'impôts.
Tout cela constitue un résumé des affaires mettant en jeu les relations peu avouables entre l'État et les entreprises, depuis la quasi-faillite du Crédit Lyonnais jusqu'à l'affaire Elf. Sont évoqués aussi bien des politiciens de gauche que de droite. Dominique Strauss-Kahn ou Martine Aubry, tous deux très liés au monde des affaires, ou Jean-Paul Huchon, qui a tenté sa chance à la direction du groupe Pinault, sont cités dans les mêmes chapitres que Gérard Longuet, Nicolas Sarkozy et bien d'autres.
Pour tous ces hommes, entre le monde politique et celui des affaires, il n'y a pas de différence. Cela va sans dire. Mais cela va mieux en le disant, et en le lisant.