La suppression d’un jour férié : Un plan de solidarité... mais avec les patrons29/10/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/10/une1839.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

La suppression d’un jour férié : Un plan de solidarité... mais avec les patrons

Bien que le gouvernement s'en défende en disant que «les dispositions finales ne sont pas encore arrêtées», le lundi de Pentecôte ne serait plus un jour férié dès 2004. Cette journée de travail supplémentaire demandée aux salariés devrait rapporter entre 1,5 et 1,9 milliard d'euros servant à financer une aide aux personnes âgées et aux handicapés.

Depuis la canicule de cet été et les 15000 morts qui ont été la conséquence du sous-équipement en matériel mais surtout du sous-effectif dans les hôpitaux publics et les maisons de retraite, l'appel à la «solidarité nationale» a été dans toutes les bouches des responsables gouvernementaux. Mais parmi les différentes hypothèses envisagées à la fin de l'été pour savoir quelles formes donner à cet effort national, une aurait soulevé l'enthousiasme du baron Seillière. «Une idée formidable», avait-il dit. Cette idée qui consiste donc à supprimer un jour férié a été retenue par le gouvernement. La charge en sera supportée par les salariés et les retraités imposables, tandis que les patrons seront non seulement épargnés, mais bénéficieront en plus de retombées.

Un cadeau au patronat payépar les salariés et les retraités ...

Sous quelle forme ce jour de travail supplémentaire imposé aux salariés devrait-il revenir à l'État? Les entreprises privées reverseraient à l'État une cotisation nouvelle de 0,2 à 0,25% de la masse salariale. Mais cette somme est loin de correspondre au produit de l'activité d'une journée de travail, chiffrée à 0,46% de la masse salariale annuelle. Si l'on fait les comptes, et ils sont simples, on voit que la moitié au moins des bénéfices gagnés à l'occasion de ce jour travaillé iront directement dans la poche des patrons. Beaucoup plus, en fait, si l'on ajoute les heures de travail effectuées gratuitement par leurs salariés!

En ce qui concerne les fonctionnaires, l'État verserait une cotisation équivalente. Les retraités imposables seraient eux aussi rançonnés pour financer le plan d'aide aux personnes âgées.

Ceux qui échappent à cet impôt supplémentaire sont les chômeurs (bien que la possibilité de les faire payer ait été évoquée) et les retraités non imposables. Mais parmi ceux qui seront dispensés de payer, il y a aussi les agriculteurs et les professions indépendantes qui n'emploient aucun salarié: les commerçants, les médecins, les avocats, etc., toutes professions qui rapportent autrement plus qu'un salaire d'ouvrier ou de caissière de supermarché.

Quant aux revenus du capital, le gouvernement parle bien de les taxer, mais cela ne se ferait qu'à hauteur de 200 millions d'euros, peu de choses comparées à la baisse de l'impôt sur le revenu, dont ils ont été les principaux bénéficiaires. C'est dire combien est dérisoire la ponction envisagée sur leurs revenus au titre de la solidarité envers les personnes âgées!

... Pour des mesures «symboliques» enversles personnes âgées

L'argent ainsi versé, en fin de compte exclusivement par les salariés, devrait pour 500 millions d'euros aller à l'Allocation personnalisée d'autonomie, aide destinée aux personnes dépendantes de plus de soixante ans, le reste servant à financer des investissements «très symboliques», aux dires d'un conseiller gouvernemental. Et il est sûr qu'on ne peut guère espérer que ce gouvernement, tout entier au service des possédants, aille au-delà du symbolique pour améliorer la situation des hôpitaux ou des maisons de retraites publiques.

Si le gouvernement avait vraiment voulu dégager des ressources pour aider les personnes âgées, il n'avait pas besoin d'imposer un jour de travail supplémentaire aux salariés, il aurait pu obtenir la même somme en n'appliquant pas la baisse de 3% de l'impôt sur le revenu, qui ne profite vraiment qu'aux plus riches. En demandant aux travailleurs de supporter seuls le prétendu effort envers les personnes âgées, le gouvernement montre une fois de plus qu'il est au service des possédants. Mais en plus du cynisme affiché et du mépris dans lequel il tient les travailleurs, il y ajoute l'hypocrisie. Sous couvert de grandes déclarations sur la «solidarité», les travailleurs paieront la démagogie gouvernementale, tandis que les patrons en tireront un bénéfice direct.

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