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États-Unis : Ses mensonges reviennent dans la figure du candidat Bush
"Nous n'avons aucune preuve crédible d'une collaboration entre le régime de Saddam Hussein et Al-Qaida pour attaquer les États-Unis", a déclaré mercredi 16 juin la commission d'enquête nommée par George W. Bush pour établir les responsabilités dans les attentats du 11 septembre 2001. Une pierre de plus déposée dans le jardin du candidat Bush à l'élection présidentielle qui se tiendra en novembre prochain. Celui-ci a réagi, le 17, en réaffirmant sans sourciller qu'"il y avait une relation entre l'Irak et Al-Qaida". Il a ajouté que son administration n'avait pas dit que le régime irakien était responsable du 11 septembre. Une tentative de faire diversion puisque personne ne prétend cela!
Bush avait été obligé de nommer une "commission indépendante" parce que les mensonges servis par lui, son gouvernement et son entourage pour justifier l'attaque armée contre l'Irak, devenaient de plus en plus visibles. Cette commission, composée de dix membres, cinq Républicains et cinq Démocrates, a examiné un certain nombre de témoignages mais aussi des milliers de pages de documents confidentiels du gouvernement et des services secrets américains. Mais, si les dix parlementaires y ont eu accès, le public, lui, devra attendre: depuis mars 2003, Bush a pris la précaution de porter le temps de protection des archives d'État américaines de dix à vingt-cinq ans.
La commission d'enquête doit faire connaître ses conclusions définitives dans un rapport fin juillet, elle a d'ores et déjà indiqué cette absence de "preuve crédible" d'une coopération entre Saddam Hussein et Al-Qaida. Or, c'est le lien supposé entre l'ex-dictateur irakien et le mouvement d'Oussama Ben Laden qui avait servi de prétexte, avec l'existence d'"armes de destruction massive" elles aussi restées introuvables, à l'intervention militaire américaine contre le régime irakien.
L'une des notes rappelle que, si Ben Laden avait envisagé l'idée de nouer des liens avec l'Irak au milieu des années quatre-vingt-dix, il l'avait abandonnée, rebuté par le caractère laïque de l'État irakien. De son côté, le régime de Saddam Hussein n'avait pas donné suite aux demandes du groupe terroriste qui souhaitait un soutien pour l'entraînement de ses hommes.
Cette note inflige donc un démenti aux déclarations mensongères inlassablement répétées, depuis le 11 septembre, par Bush et son entourage. Et que le vice-président Cheney répétait encore à la veille de la publication des deux notes de la Commission.
Le rapport final de celle-ci pourrait être plus nuancé, et son contenu pourrait même être en recul par rapport aux notes préliminaires, dit-on. En attendant, celles-ci confirment que les prétextes mis en avant par l'administration Bush pour intervenir en Irak n'étaient que de gros mensonges destinés à obtenir le soutien sans faille de l'opinion publique américaine. Les États qui s'engagent dans une guerre n'ont pas pour habitude de dire la vérité à leur population pour justifier leur engagement militaire, ni d'afficher leurs vraies raisons. Lors de leur engagement au Viêt-nam au début des années soixante, les États-Unis avaient monté une provocation pour justifier leur intervention. Quand le pot aux roses avait été découvert quelques années après, cela n'avait pas empêché les dirigeants américains de poursuivre encore longtemps leur sale guerre.
Dans un livre paru récemment, l'ex-secrétaire au Trésor américain Paul O'Neill, qui a occupé ce poste au sommet de l'État entre 2001 et 2002, affirme que, dès janvier 2001, dix jours après sa prise de fonction, l'administration Bush examinait la possibilité d'une intervention armée contre l'Irak. "Une nouvelle orientation venait d'être décidée au sommet, raconte O'Neill. L'hypothèse de départ était que le régime de Saddam déstabilisait la région, et qu'il était clairement susceptible de détenir des armes de destruction massive... L'Irak était le sujet principal." Les attentats du 11 septembre, assaisonnés de quelques mensonges cyniques, leur ont fourni le prétexte pour exécuter un projet déjà bien préparé.
Que les mensonges soient avérés n'empêche pas les actuels dirigeants américains de les répéter et également de poursuivre l'occupation de l'Irak. Même s'ils se préparent ces jours-ci à confier les clés de la maison Irak à un gouvernement local à leur botte, ils entendent y conserver la réalité du pouvoir.
Cette politique sera peut-être sanctionnée à la prochaine élection présidentielle, et il reviendrait à l'adversaire démocrate, Kerry, qui a soutenu la guerre de Bush en Irak, de trouver le moyen de la poursuivre. Mais on aura pu voir que la guerre "morale" du "Bien contre le Mal", et autres fadaises, a été décidée par des sinistres crapules, cyniques et sans scrupules, et d'autant plus dangereux que les moyens dont ils disposent, dans le cas des dirigeants des États-Unis, peuvent être immenses et destructeurs.