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Kosovo : Bush est pour l'indépendance... quand ça l'arrange
" Vous devez dire : ça suffit, le Kosovo est indépendant ". C'est ce qu'a déclaré G. Bush, lors d'une conférence de presse faite conjointement avec le Premier ministre albanais, dimanche 10 juin.
Depuis 1999 le Kosovo, province de l'ex-Yougoslavie puis de la Serbie après l'éclatement de ce pays, est passé sous l'autorité de l'ONU. C'est en fait un protectorat international assuré par des bases militaires de l'OTAN, composées pour l'essentiel de troupes anglaises, françaises, allemandes ou américaines. La présence internationale était censée pacifier la région, après les massacres et les épurations ethniques, et acheminer le pays vers la paix et la stabilité, pour mieux laisser la population décider de son sort.
Huit ans après, les troupes sont toujours là ; le sous-développement aussi, les puissances internationales étant plus promptes à envoyer des soldats que les aides économiques qu'elles ont promises. Les tensions existent toujours, entre les Albanais, qui sont deux millions, et la minorité serbe, qui compte cent à cent vingt mille personnes. Ces tensions sont entretenues par les extrémistes nationalistes, à l'intérieur et à l'extérieur du pays. En Albanie, certains verraient d'un bon oeil une grande Albanie, avec intégration du Kosovo. En Serbie, le gouvernement ne veut pas entendre parler d'une quelconque indépendance de son ex-province, d'autant plus qu'elle l'obligerait à accueillir des dizaines de milliers de Serbes kosovars venant grossir le nombre de ses chômeurs, qui est déjà du tiers de sa population active.
Au niveau international, la Russie refuse catégoriquement l'indépendance de la région, qui ainsi passerait encore un peu plus sous influence américaine. Elle craint que ce ne soit un mauvais exemple pour d'autres régions qui la touchent de plus près, en encourageant par exemple un regain de nationalisme en Tchétchénie ou dans des républiques autonomes du Caucase. Pour les raisons exactement inverses, le gouvernement américain est totalement favorable à cette " indépendance sous supervision internationale ", comme le préconise le récent rapport du médiateur de l'ONU. Et les États européens lui emboîtent le pas.
Des USA aux dirigeants européens ou russes, il est frappant de voir combien tous sont prêts à invoquer le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes et à avoir leur indépendance, mais ne s'en montrent réellement partisans que quand cela les arrange.
Bush, si prompt à réclamer la liberté pour les Kosovars, est nettement plus timide quand il s'agit du droit des Palestiniens à disposer d'eux-mêmes et à avoir un État. Quand un dirigeant comme lui s'affirme partisan de la liberté des peuples, on ne peut que se demander ce que cela cache. Il se trouve simplement que l'intérêt américain est de morceler un peu plus la région, afin de mieux asseoir son influence et de s'opposer à la Serbie, dont les sympathies prorusses le gênent.
Les Kosovars ont, évidemment, le droit d'avoir leur propre existence nationale puisqu'ils le souhaitent, comme d'ailleurs tous les peuples de l'ex-Yougoslavie. Mais justement, le démembrement de la Yougoslavie, encouragé par les différentes puissances impérialistes, n'a pas résolu les conflits ethniques, au contraire, il les a encore accumulés et aiguisés, faisant resurgir des problèmes nationaux entre des minorités pour lesquelles ces antagonismes semblaient avoir disparu.
Au fil des décennies, les différents impérialismes ont découpé les Balkans, morcelé la région en piétinant les aspirations des peuples. Le soutien hypocrite de Bush à l'indépendance du Kosovo ne dérogera pas à la règle.