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Leur société
Éducation nationale : Sarkozy cultive " l'évaluation et le résultat "... pas les élèves
Le 2 juin, Sarkozy réunissait à l'Élysée ceux qu'il nomme " l'ensemble des cadres dirigeants de l'Éducation nationale et de l'enseignement supérieur ", autrement dit les recteurs et inspecteurs d'académie, inspecteurs généraux et présidents d'université. Le ton " entrepreneurial " une fois donné, Sarkozy a attaqué sur la " réforme " des lycées et la formation des professeurs.
Dès septembre 2009 se mettrait en place " un lycée beaucoup plus souple ", présentant des " modules ", des " moments d'étude " alternant avec les cours, " une manière nouvelle, plus originale, plus individuelle, plus progressive aussi, de se spécialiser ", et autres termes plus flous les uns que les autres. Il y aurait plus de souplesse, mais moins... d'options " qui n'arrangent pas la santé des finances publiques " et " où personne ne va ", à en croire Darcos dont l'objectif essentiel reste la suppression de 11 500 postes d'enseignants en septembre et de milliers d'autres encore les années suivantes.
" Une plus grande autonomie des lycéens ", c'est ce qu'annonçait le ministre de l'Éducation nationale il y a quelque temps, tentant de trouver une réponse aux élèves, aux enseignants et aux parents qui manifestent depuis des mois contre les postes de professeurs et autres personnels éducatifs supprimés dans les collèges et les lycées. Cette expression purement démagogique risque fort, en effet, d'acquérir un sens concret : des élèves pourraient être privés de cours en demi-groupe, d'options de langues et de matières considérées comme secondaires, et être de moins en moins encadrés, que ce soit pour leurs travaux personnels, le soutien en cas de difficultés, ou le choix d'une orientation. Et tant pis pour de nombreux enfants de familles modestes, parfois livrés à eux-mêmes dans le dédale du jargon pédagogique !
Mais une école répondant vraiment aux besoins des élèves exigerait précisément plus de personnel adulte autour des jeunes, des conseillers d'éducation et d'orientation, des surveillants et aides-éducateurs, des agents administratifs et d'entretien, et bien sûr des enseignants. Des enseignants qui devraient être d'autant plus formés que le parcours des élèves, leurs demandes, s'individualiseraient avec " l'autonomie " que Sarkozy et Darcos disent souhaiter.
C'est justement là que le show présidentiel devant les recteurs dévoile l'arrière du décor : les enseignants " mieux formés ", dont les études seraient " allongées d'un an ", verraient en réalité leur formation professionnelle, en Institut universitaire de formation des maîtres, raccourcie avant que les IUFM ne soient supprimés. Là aussi, derrière les grands mots creux de " revalorisation ", " reconnaissance ", se dissimule à peine l'unique objectif de restriction budgétaire : en supprimant l'année de stage rémunérée dont tout futur enseignant bénéficie jusqu'à présent, en plaçant celui-ci plus tôt devant des élèves, le ministère économiserait 20 000 postes !
Faisant allusion à leur métier, Sarkozy invite les professeurs à " évoluer " et à entrer " dans la culture de l'évaluation et du résultat ". Des personnels ? Des écoles ? Des élèves ? Les menaces diffuses et l'artillerie lourde de la politique d'économies à grande échelle ne risquent en tout cas pas de régler " le malaise enseignant " dont Sarkozy se prétend conscient. Les écoles où instituteurs et parents restent mobilisés, et sans doute la rentrée de septembre, seront là pour le lui rappeler.