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Grande-Bretagne : Nationalisation des dettes et subventions étatiques pour les banquiers
Moins de deux semaines après la quasi-faillite de HBOS, rachetée en catastrophe par l'une de ses rivales, c'est au tour de B&B (Bradford and Bingley), numéro 8 des banques britanniques et numéro 3 dans le prêt immobilier, de disparaître.
B&B s'était spécialisé dans deux types de prêts hypothécaires : d'une part à des particuliers désirant acheter un logement pour le louer ensuite, et d'autre part à des emprunteurs ne souhaitant pas donner de preuve de leurs revenus (en général pour des raisons fiscales), mais prêts à accepter un taux d'intérêt plus élevé en retour.
Par définition, ces deux catégories étaient « à risque ». En fait, le système ne marchait que parce que les emprunteurs se livraient à une cavalerie permanente, en finançant les traites de leurs emprunts par d'autres emprunts gagés sur les mêmes logements, qu'ils trouvaient facilement grâce à la montée rapide des prix immobiliers.
Seulement, avec la baisse de ces prix, de tels prêts secondaires se sont raréfiés, puis sont devenus quasi introuvables. D'où la dégringolade des actions de B&B en Bourse. Après avoir été l'une des cent plus grosses capitalisations boursières de la City, B&B a vu son action perdre 95 % de sa valeur, avant d'être retirée du marché par les autorités, le 27 septembre.
Cette fois, toutes les tentatives de rachat en bloc ont échoué et la banque a été démantelée. L'État reprend à son compte son portefeuille de prêts immobiliers, d'une valeur de 64 milliards d'euros, et les dettes gagées sur ces prêts, qui représentent la moitié de cette valeur. Le reste de B&B, c'est-à-dire ses 340 agences et les 26 milliardsd'euros de dépôts, est racheté pour une bouchée de pain (500 millions d'euros) par le géant espagnol Banco de Santander, qui contrôle déjà deux banques immobilières anglaises.
Comme les pertes de B&B avaient écorné les fonds de ses déposants de 22 milliards d'euros, c'est la Caisse de Compensation Financière, organisme financé par les banques pour aider les déposants en cas de faillite, qui comblera le trou. Mais comme cette caisse manque paraît-il de fonds, le Trésor lui « prêtera » 25 milliards d'euros pour faire face aux dépenses urgentes.
Le gouvernement n'a pas manqué de présenter cette opération de sauvetage comme une « nationalisation », tout en affirmant que toute perte financière résultant de cette opération serait supportée par les banques. Mais cette fois il s'agit, sans ambiguïté, d'une nationalisation des dettes de B&B, tandis que la partie profitable de la banque va à une banque privée, copieusement arrosée de subsides étatiques. Quant aux 25 milliards avancés par l'État, ils seront effectivement remboursés par les banques, mais uniquement par le biais de leurs cotisations au Fonds de Compensation, et seulement à partir de 2011. Autrement dit, cette opération a toutes les chances de ne rien coûter de plus aux banques que ce qu'elles auraient dû débourser de toute façon.