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- Lutte ouvrière n°2134
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Editorial
À force de singer les aristocrates, Ah ! Ça ira, ça ira, ça ira...
Un petit tour, un discours, et puis s'en va... Oui, mais pour un président porté sur le clinquant, il fallait que ce soit au château de Versailles ! Députés et sénateurs ont donc été convoqués pour entendre la Parole présidentielle. Tout cela pour la modique dépense de 400 000 euros. Ça fait cher la minute de parole. Mais se pavaner sous les lambris dorés, cela a un coût.
But officiel de la mascarade : « tracer de nouveaux horizons pour la France ». Mais, du point de vue des salariés et des classes populaires, l'horizon est tout dessiné et Sarkozy n'y a pas ajouté la moindre touche d'espoir. L'horizon, c'est la crise économique qui se poursuit, c'est le chômage qui s'aggrave, ce sont les conditions d'existence des classes populaires qui se dégradent.
Sur les questions d'emploi, qui constituent la préoccupation essentielle des classes laborieuses, licenciements, fermetures d'usines, dégringolade du pouvoir d'achat, Sarkozy ne peut rien, même à supposer qu'il le veuille. Il n'y peut rien parce que, même s'il s'entoure le temps d'un Congrès des fastes de la monarchie absolue, il n'a pas le pouvoir d'agir sur l'économie, qui est contrôlée par quelques dizaines, quelques centaines tout au plus, de groupes financiers. Mais de toute façon, quand bien même il le pourrait, il ne le voudrait pas car il est l'homme de ces groupes financiers. Sa fonction consiste à justifier politiquement la façon dont ces groupes capitalistes mènent la société. Et à leur rendre de menus services.
Versailles comme l'Élysée, comme le Palais-Bourbon, ne sont que des décors de théâtre dans lesquels s'agite un personnel politique qui se pose en représentant de la nation en se prévalant du suffrage universel.
Mais les véritables lieux de pouvoir, ce sont ces conseils d'administration où on peut décider des suppressions d'emplois massives, des délocalisations ou des fermetures complètes d'usines, sans avoir de comptes à rendre à quiconque, quand bien même ces décisions engagent la vie de milliers d'hommes et de femmes et de villes entières.
Non, Sarkozy n'a dessiné aucun nouvel horizon pour les classes populaires. Il n'a fait qu'ajouter quelques mesures antiouvrières de plus dans la guerre menée par le grand patronat, par la classe capitaliste, contre la majorité de la population, et en particulier les salariés. Il a officialisé l'attaque contre les retraites déjà annoncée par son ministre du Travail, tout en restant dans le vague sur la question de savoir s'il compte repousser l'âge de la retraite ou diminuer les pensions, ou les deux à la fois.
Obliger à rester en activité plus longtemps ceux qui sont usés par le travail est abject car, dans certains métiers, l'espérance de vie dépasse à peine ce qui sera fixé comme âge de la retraite ! Et c'est de toute façon un moyen de refuser une pension à taux plein à tous ceux que les patrons ne tiennent pas à garder, et encore moins à embaucher. Et il y en a qui ont le culot d'expliquer que c'est inévitable, car le nombre de retraités augmente par rapport au nombre d'actifs. Mais ils n'ajoutent jamais qu'avec l'augmentation de la productivité, un nombre plus réduit d'actifs produit bien plus de richesses qu'il y a cinquante ans ! Alors, pourquoi faut-il reculer l'âge de la retraite si ce n'est parce que le surplus de richesses créées est accaparé, non pas par ceux qui le produisent, mais par les riches parasites du travail des autres ?
Et tout est à l'avenant. Lorsqu'il insiste sur la nécessité de réduire le déficit public en freinant les dépenses, Sarkozy ne parle ni du coût du bouclier fiscal, ni des milliards versés aux entreprises ou aux banques. Il parle de suppressions d'emplois dans les services publics où pourtant, de l'Éducation nationale à la Santé, les effectifs manquent cruellement.
Alors, si cela ne dépendait que du patronat et de ses porte-parole à la tête de l'État et du gouvernement, l'horizon des classes populaires serait de plus en plus sombre. Mais il arrive que la vie sociale ne dépende pas seulement de ceux d'en haut.
Versailles a été le symbole de la monarchie absolue, au service d'un ordre social où la majorité de la population trimait pour assurer à quelques milliers de parasites de l'aristocratie une vie aussi luxueuse qu'inutile pour la société. Jusqu'à ce que le petit peuple de Paris vienne déloger de Versailles les parasites de haute volée, roi compris...
Éditorial des bulletins d'entreprise du 22 juin