L'Union européenne et la Grèce : Fausse solidarité et vraies mesures d'austérité17/03/20102010Journal/medias/journalnumero/images/2010/03/une2172.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

L'Union européenne et la Grèce : Fausse solidarité et vraies mesures d'austérité

Les ministres des Finances de l'Union européenne ont, paraît-il, conclu un accord pour apporter une aide financière à la Grèce, accord qui, pour voir vraiment le jour, doit être ratifié par les chefs d'État et de gouvernement européens lors d'un prochain sommet vers la fin mars. Mais outre qu'il vient après des mois de tergiversations et d'exigences des dirigeants européens auprès du gouvernement grec pour qu'il lance un plan d'austérité draconien, cet accord est on ne peut plus flou.

Dans la mesure où certains éléments en ont filtré à travers la presse, il s'agirait de prêts bilatéraux, d'État à État, puisque la Banque centrale européenne n'a pas le droit de prêter à un État en difficulté. Le calendrier, les taux d'intérêt sont inconnus et le montant serait de plusieurs milliards d'euros, entre vingt et trente selon « certaines sources européennes »...

Selon le président de l'Eurogroupe, Jean-Claude Junker, les ministres n'ont fait que « clarifier des modalités techniques qui permettront de prendre une action coordonnée » si nécessaire, en précisant immédiatement que justement, ce n'est pas nécessaire pour le moment. La Grèce « n'a pas demandé d'aide » et d'ailleurs elle est « en bonne voie » : ses dernières mesures - hausses de taxes et coupes dans les salaires, les pensions et les emplois publics - devraient rétablir sinon son économie, du moins la confiance des marchés en réduisant le déficit public... et en accroissant la pauvreté de sa population.

Dans les réticences à sortir le porte-monnaie, le ministre allemand a été le plus clair et la presse allemande également, qui a longuement disserté sur l'inconséquence des Grecs qui auraient vécu au-dessus de leurs moyens, triché sur leur déficit pour entrer dans l'Europe et qui n'auraient plus maintenant qu'à « se sauver eux-mêmes ». Mais, pour être plus circonspects dans leurs propos, les autres chefs de gouvernement n'en sont pas moins sur la même longueur d'onde. Pour tous ces États européens la « solidarité » bien comprise, c'est fournir une aide en cas d'extrême urgence pour éviter une éventuelle faillite et la contagion qui pourrait en résulter, mais c'est surtout dépenser le moins possible. Ils n'annoncent cette aide éventuelle que pour tenter de calmer les spéculateurs, ce qui n'est absolument pas garanti. Après la Grèce, ils peuvent viser demain d'autres États européens, et pas forcément les plus pauvres.

Tous les États sont endettés bien au-delà des critères de bonne gestion européenne qui exigeraient que le déficit public ne dépasse pas 3 % du produit intérieur brut (PIB). Le déficit public de la France s'est élevé officiellement à près de 8 % du PIB en 2009, celui du Royaume-Uni devrait atteindre 12,5 % en 2010, comme celui de la Grèce actuellement. Tous se sont endettés pour soutenir leurs capitalistes et leurs banques en leur fournissant des milliards qui se retrouvent à nouveau dans la spéculation. Ces fonds publics représenteraient environ 8 à 10 % du produit intérieur brut des principaux États européens.

La Banque centrale européenne a su fournir aux banques privées des capitaux à un taux dérisoire, capitaux que ces banques ont à leur tour prêtés très cher aux États et entre autres à la Grèce, qui emprunte à un taux deux fois plus élevé que l'Allemagne. En revanche, il est interdit à cette même Banque centrale de prêter le moindre centime aux pays de l'Union européenne dont la situation devient dramatique !

La Grèce n'est pas la seule dans la ligne de mire des spéculateurs. Les pays de l'Union européenne, à commencer par ceux dont l'économie est la moins solide, comme l'Espagne ou le Portugal, sont d'ores et déjà concernés. Ce dernier a revu à la hausse ses estimations concernant sa dette publique ; il a aussi annoncé des mesures d'austérité (gel des salaires et des emplois dans le public) pour 2010 et il prévoit un plan d'austérité à appliquer d'ici 2013, mesures qualifiées de « courageuses » par le chef de file des ministres des Finances, Jean-Claude Junker.

Toute cette politique européenne, ou plutôt la politique imposée par les États européens les plus riches aux plus pauvres, consiste non à mettre un frein aux appétits des spéculateurs mais à leur obéir et à exiger davantage de sacrifices de la population. Les gouvernements n'ont nullement l'intention ni la capacité de contrôler les « institutions financières » responsables de la spéculation, qui sont l'émanation de leurs propres banques auxquelles ils ne savent rien refuser. Malgré leurs propos sur le contrôle des marchés, ils ne font que s'incliner devant eux.

Leur seule solution c'est d'appauvrir la population, d'essayer de lui faire payer les frais de la crise. Mais jusqu'à quand ?

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