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Dans le monde
Palestine : Une lutte contre la barbarie des « crimes d'honneur »
En Palestine comme dans une partie du Moyen-Orient, les crimes dits d'honneur bénéficient d'une indulgence intolérable.
Un parent peut - sans encourir plus de quelques mois de prison - tuer une femme suspectée d'avoir trahi le code d'honneur familial, soit parce qu'elle est convaincue d'adultère, soit tout simplement parce qu'elle a parlé avec un homme. Il y a quelques années, Souad Marie avait ému le public européen en racontant son histoire dans Brûlée vive : elle avait été condamnée à mort par sa famille parce qu'elle était enceinte d'un jeune homme qui ne désirait pas l'épouser. Arrosée d'essence par son beau-frère, elle avait réussi malgré les flammes qui la dévoraient à s'enfuir et à survivre. Ce beau-frère n'avait jamais été condamné. Une association humanitaire avait fini par prendre en charge Souad Marie, abandonnée à l'hôpital par sa famille
Mais les temps changent et c'est une histoire presque similaire qui a provoqué la colère de tout un village en Cisjordanie, à l'ouest d'Hébron : Ayah Baradeya a été noyée par son oncle parce que ce dernier désapprouvait son projet de mariage. En temps ordinaire, il n'aurait écopé que de quelques mois de prison, puisqu'il prétendait invoquer l'honneur de la famille. Mais le frère de la jeune femme n'a pas voulu d'un tel dénouement. Bravant le qu'en-dira-t-on qui prévalait jusqu'alors, il a fait connaître son histoire sur la place publique et a ameuté le village pour réclamer justice. Il a cependant refusé que la famille du meurtrier soit bannie du village, comme le demande la coutume, arguant que cette dernière n'y était pour rien, mais a réclamé une peine de prison exemplaire pour le meurtrier. Cela revenait à exiger la modification du Code pénal.
La mobilisation a dépassé largement le village, entraînant des milliers de personnes dans la rue plusieurs jours de suite. Jusqu'alors le président Mahmoud Abbas avait résisté aux demandes des organisations féministes, qui dénonçaient l'augmentation de ces crimes ces dernières années : en 2010, dix meurtres avaient été recensés officiellement. Mais face à la pression de la rue, le président de l'Autorité palestinienne a fini par céder et a décrété la fin de l'indulgence pour les crimes d'honneur.
D'ores et déjà, deux articles du Code pénal ont été annulés, il en reste cependant un à supprimer pour mettre fin définitivement à l'impunité de ces crimes. Une victoire pour la population de ce village, qui a su vaincre les préjugés pour en finir avec cette barbarie, et une victoire pour toutes les femmes.