Hébergement d'urgence : Une situation indigne22/12/20112011Journal/medias/journalnumero/images/2011/12/une2264.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Hébergement d'urgence : Une situation indigne

Le jeudi 15 novembre sont parus deux rapports sur l'hébergement d'urgence en France. L'un émane de la Cour des comptes, organisme d'État qui, au nom d'une bonne gestion, critique parfois le gouvernement. L'autre, rédigé par l'Observatoire du 115 (le numéro d'accueil et d'aide aux sans-abri), est publié par la Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale (Fnars). L'un comme l'autre constatent un manque dramatique de moyens.

La presque-totalité des demandes d'aide qui parviennent au 115 concernent l'hébergement, et 43 % ne peuvent être satisfaites, en dépit de toute la bonne volonté déployée par le personnel des associations. Pourtant le nombre de places se serait accru de 58 % depuis 2004. Mais la demande a explosé, augmentant de 75 % en dix ans du fait de la crise et de l'appauvrissement de la population. La Cour des comptes estime que les sans-abri sont en dix ans passés de 85 000 à 150 000. Et de plus en plus, il s'agit de familles avec enfants.

Face à cette demande croissante, le gouvernement a d'abord prétendu qu'il allait privilégier « l'accès à un logement pérenne et adapté », le Premier ministre Fillon prétendant même faire de l'hébergement et de l'accès au logement un « chantier national prioritaire 2008-2012 ». Mais les logements et le chantier national sont restés en plan et les sans-abri ont continué à être renvoyés à la rue dès le printemps.

Pire : sous prétexte de favoriser le logement durable, le gouvernement a diminué en avril 2011 les fonds pour l'hébergement d'urgence. 900 places ont été fermées à Paris, 1 156 en Seine-Saint-Denis. Ces réductions drastiques avaient à l'époque provoqué les protestations du maire de Paris et des présidents des Conseils généraux du Val-de-Marne et de la Seine-Saint-Denis. Ces élus dénonçaient la réapparition des bidonvilles, la déscolarisation des enfants, la rupture du suivi social et l'insécurité qui frappait toute une population démunie.

Avec le retour de l'hiver, le problème est réapparu, plus insoluble que jamais, près de la moitié des demandes ne trouvant pas de solution.

Quant aux sans-papiers, ils sont de plus en plus exclus des centres d'hébergement. Les quotidiens Libération et Le Monde ont fait état fin novembre de directives en ce sens émanant de certaines préfectures. En octobre 2007, lors de la journée mondiale du refus de la misère, Sarkozy affirmait : « Quand quelqu'un est à la rue, qu'il est dans une situation d'urgence et de détresse, on ne va tout de même pas lui demander ses papiers. Dans les centres d'urgence, on doit accueillir tout le monde. »

Mais la réalité est totalement contraire à ces déclarations. En fait, l'État se dégage le plus possible de ses responsabilités dans l'hébergement d'urgence, laissant en première ligne les départements et les mairies. Ainsi le maire de Pantin, Bertrand Kern, dénonçait dans Le Parisien du 8 décembre un cycle infernal : le manque d'hébergements fait naître des squats d'immeubles insalubres, leur expulsion ne fait que les repousser un peu plus loin, au risque d'accidents ou d'incendies mortels, comme celui qui a fait six morts à Pantin le 28 septembre.

Pour empêcher de tels drames, l'hébergement d'urgence devrait certes être une priorité. Mais avant tout il faudrait bâtir tous les logements qui manquent, et dont l'absence provoque cette situation indigne.

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