Déserts médicaux : Le gouvernement refuse de s'opposer au libéralisme05/12/20122012Journal/medias/journalnumero/images/2012/12/une2314.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Déserts médicaux : Le gouvernement refuse de s'opposer au libéralisme

Un salaire mensuel de 4 600 euros garanti par l'État à tout jeune médecin qui voudra bien s'installer dans un « désert médical », voilà qui ferait envie à tous les jeunes qui, diplômés ou pas, n'ont que le chômage ou la précarité en guise de perspective d'avenir. Et voilà qui ne réglera en rien le problème du manque de médecins dans ces « déserts ».

Depuis des années, des dizaines d'années même, le manque de médecins dans certaines régions -- zones rurales peu habitées mais aussi zones urbaines sinistrées par le chômage -- est régulièrement pointé du doigt. Au fil des ans, les disparités n'ont fait que s'accroître, entre par exemple d'un côté Paris ou la Côte-d'Azur, et de l'autre la Lozère ou la Picardie. Et ces disparités vont encore augmenter dans les prochaines années, avec le départ en retraite de milliers de médecins qui ne trouvent pas de successeur.

Pour y pallier, Marisol Touraine a donc annoncé une mesure d'incitation financière. Il s'agit de garantir à 200 jeunes médecins nouvellement diplômés, qui accepteront de s'installer là où on a besoin d'eux, un salaire de 55 000 euros par an, soit environ 4 600 euros par mois. En fait, ces praticiens territoriaux de médecine générale seront payés, comme c'est l'habitude en médecine libérale, par les malades qu'ils recevront en consultation ou iront voir à domicile. Mais si leur rémunération n'atteint pas cette somme, la Sécurité sociale leur versera la différence, et cela pendant deux années. À bien y regarder, 4 600 euros, c'est 200 consultations à 23 euros par mois, c'est-à-dire dix consultations par jour pour un médecin qui travaille cinq jours par semaine. Or un médecin, a fortiori dans une région sous-médicalisée où on a besoin de lui, voit beaucoup plus de malades que cela. C'est donc une mesure qui aura au moins l'avantage de ne pas coûter cher à la Sécurité sociale. Mais c'est surtout une mesure totalement inopérante.

Comme d'autres professions libérales, les médecins sont libres de s'installer là où ils veulent. Pour la plupart, ils choisissent donc de s'installer là où leur activité promet d'être la plus rémunératrice et où les conditions d'exercice et de vie sont les plus agréables. Sauf qu'à la différence d'autres professions libérales, comme les notaires ou les huissiers, pour ne citer que ceux-là, les médecins, eux, sont indispensables à toute la population.

Il serait donc nécessaire qu'ils soient obligés de choisir leur lieu d'installation, au moins pour quelques années, en fonction de ces nécessités. D'autant que, pendant toute leur formation dans les centres hospitaliers universitaires, ils bénéficient des investissements de l'État et de l'argent public. Ce ne serait donc qu'un juste retour des choses, et c'est du reste ce qu'on demande aux enseignants qui, une fois diplômés, sont nommés là où on a besoin d'eux, en contrepartie du fait qu'ils ont bénéficié pendant leurs études de professeurs et de structures financés par la collectivité.

Ce serait une légère entorse à la médecine libérale, mais ce n'est pas dans cette voie que ce gouvernement s'oriente, loin de là.

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