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- Lutte ouvrière n°2320
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Editorial
La droite réactionnaire se fait entendre ? Aux travailleurs d'en faire autant !
Alors que l'armée française est entrée en guerre au Mali, alors que le patronat prépare des attaques sans précédent contre les travailleurs, qu'est-ce qui fait débat ? Le mariage homosexuel !
Certes, les opposants au mariage homosexuel ont fait une démonstration de force. La manifestation de dimanche n'était peut-être pas à la hauteur de leurs espérances, mais elle était importante. L'Église catholique avait mobilisé ses réseaux depuis des semaines, non seulement les plus réactionnaires, ceux qui se disent encore opposés au divorce ou à l'avortement, mais aussi plus largement ceux qui sont contre l'adoption pour les couples homosexuels.
Mais si le débat a pris cette ampleur, c'est que la droite l'a monté en épingle et a pris la manifestation en marche. Pour Copé, le chef mal élu de l'UMP, il ne pouvait y avoir meilleure occasion pour ressouder son camp. « Défendre la famille », c'était le prétexte rêvé pour mener sa première grande offensive politique contre Hollande. Mais quelle hypocrisie !
Il y a dans le pays plus d'un million d'enfants qui vivent dans des familles recomposées, près de trois millions dans des familles monoparentales, principalement avec la mère. Et, n'en déplaise aux conservateurs de tout poil, les couples homosexuels existent et sont nombreux. Ils peuvent avoir une vie affective et familiale aussi équilibrée que n'importe qui : ils doivent avoir les mêmes droits.
Ce n'est pas le mariage homosexuel qui menace « l'équilibre familial », ce sont les attaques du patronat et des gouvernements qui se succèdent, qu'ils soient de droite comme de gauche. Quelle vie de famille pour celui qui travaille la nuit, en équipe ou en horaires décalés ? Quel équilibre pour les enfants qui ne voient pas leurs parents parce qu'ils ont été forcés de travailler à l'autre bout du pays ? Quel épanouissement du père, de la mère, des enfants, quand on n'a pas de logement digne ? Quand on n'arrive pas à joindre les deux bouts ?
La droite se sert de cette manifestation pour se prévaloir d'être la seule opposition. Que la première grande manifestation contre Hollande vienne de ce camp doit être un avertissement pour les travailleurs. Car la droite n'est pas seulement conservatrice, elle est surtout antiouvrière. Sans que la droite n'exerce véritablement de pression, Hollande a repris la politique de Sarkozy. Qu'en sera-t-il si elle se met en ordre de bataille ?
Si les travailleurs ont une leçon à tirer de cette manifestation, c'est qu'ils doivent occuper le terrain politique. Ils ont mille fois plus de raisons d'aller manifester ! La crise menace l'emploi et la vie de millions de travailleurs, le chômage et la misère gangrènent la société. La mobilisation des travailleurs contre les responsables que sont le grand patronat et le gouvernement aurait une tout autre légitimité, car ils ne se battraient pas seulement pour leurs intérêts mais pour toute la société.
Les travailleurs ont la force pour cela : ils ont la force du nombre et ils peuvent peser non seulement en manifestant mais aussi en faisant grève, en occupant les usines. Ils peuvent bloquer tout le fonctionnement de la société.
Cette manifestation montre que nous sommes, nous les travailleurs, bien en retard. Il est vrai que ceux qui devraient organiser le combat, les chefs des confédérations syndicales, s'y refusent, quand ils ne rallient pas l'adversaire comme cela s'est produit avec « l'accord sur l'emploi ».
Car la signature de la CFDT, CFTC et CGC est une nouvelle reddition. Les dirigeants de ces syndicats prétendent que c'est une victoire parce qu'ils ont imposé au patronat la taxation des contrats courts. C'est une fumisterie : les missions d'intérim, les remplacements de salariés malades et en congés maternité ne sont même pas concernés ! Quant aux mesures sur la flexibilité, elles sont faites pour rendre les salariés corvéables à merci et pour rendre les licenciements plus rapides et plus faciles.
Bien des travailleurs ont déjà été forcés de choisir entre des baisses de salaire, une mutation à l'autre bout du pays, un allongement de la durée du travail, la suppression de RTT, ou le licenciement. Eh bien, ce chantage patronal va devenir la loi, une loi du PS ! C'est inacceptable, il faut le combattre. Et seuls les travailleurs peuvent le faire. Aux travailleurs de dire ce qu'ils pensent de leurs directions syndicales. Aux travailleurs de les pousser à prendre l'initiative !
Éditorial des bulletins d'entreprise du lundi 14 janvier