Le Comité permanent amiante au service des industriels22/05/20132013Journal/medias/journalnumero/images/2013/05/une2338.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Le Comité permanent amiante au service des industriels

Les neuf personnes que la juge Bertella-Geffroy avait mises en examen dans l'affaire de l'amiante et qui se trouvent blanchies pour le moment sont au cœur de l'opération mise sur pied par patronat et gouvernement pour protéger les profits des industriels utilisant l'amiante.

Il s'est agi en France d'une véritable conspiration basée sur le mensonge, pilotée conjointement par les industriels et l'État, en particulier lorsque la gauche était au gouvernement, et avec la collaboration d'une partie des centrales syndicales.

Cette opération d'ampleur concernait une très grande partie des secteurs de l'industrie : cela allait des sociétés qui possédaient des mines d'extraction comme Saint-Gobain, à ceux qui transformaient l'amiante, comme Eternit, et s'étendait au bâtiment avec le fibro-ciment employé partout, à la métallurgie avec de multiples applications allant des plaquettes de frein aux transformateurs électriques, en passant par les chantiers navals qui en utilisaient à profusion, à la chimie et un peu partout dans les autres secteurs. Et elle s'est mise en place en 1982, juste après l'arrivée au pouvoir de la gauche avec Mitterrand, et le PS et le PC au gouvernement.

Tout le monde connaissait les risques liés à l'utilisation de l'amiante, les protestations montaient dans le monde. C'est pour les contrer et maintenir l'utilisation de l'amiante par les industriels, pour leur plus grand profit, que le patronat proposa en 1982 la mise sur pied du Comité permanent amiante, réunissant les représentants de toute l'industrie, l'État avec les représentants des principaux ministères, Industrie, Travail et Santé, les centrales syndicales qui acceptèrent d'y siéger au nom de la « défense de l'industrie française », des scientifiques complaisants. La présidence, en toute ironie, fut donnée au président de l'Institut national de recherche et de sécurité, l'INRS, chargé en théorie de promouvoir la protection des salariés au travail. Cet individu allait être le principal activiste en vue d'empêcher l'interdiction de l'utilisation de l'amiante en France.

Le but affiché de ce Comité était de promouvoir l'utilisation de l'amiante, la « bonne utilisation », comme ils disaient. La collaboration au service du patronat était tellement patente et indécente qu'assez rapidement Force Ouvrière décida de s'en retirer. L'action s'intensifia justement après 1984 quand le Bureau international du travail, qu'on peut difficilement classer comme contestataire, préconisa l'interdiction internationale de l'utilisation de l'amiante à cause de ses dangers avérés. C'est là que Martine Aubry oeuvra en tant que directrice générale du travail pour faire obstacle avec le gouvernement français à la décision du BIT. Cette collaboration patronat-État-syndicats allait se traduire par des dizaines de milliers de victimes.

Il fallut attendre 1996 pour que le gouvernement Chirac promulgue l'interdiction totale de l'amiante. Le Comité permanent amiante s'était entre-temps éteint sous les feux de la critique.

Tous ceux qui, de près ou de loin, ont collaboré à cette opération sont coupables, si ce n'est aux yeux de la justice, en tout cas aux yeux du monde du travail et de toute la société.

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