Nathalie Arthaud, dimanche 24 mai : Renouer avec les traditions révolutionnaires de la classe ouvrière27/05/20152015Journal/medias/journalarticle/images/2015/05/page_11_forum-pol2015-05242015-050_0.JPG.420x236_q85_box-0%2C285%2C5472%2C3363_crop_detail.jpg

La Fête de Lutte Ouvrière

Nathalie Arthaud, dimanche 24 mai : Renouer avec les traditions révolutionnaires de la classe ouvrière

Illustration - Renouer avec les traditions révolutionnaires de la classe ouvrière

(…) Le gouvernement ne se contente pas de fouler aux pieds les intérêts matériels des travailleurs et des chômeurs, il les déboussole et les désarme politiquement.

Le gouvernement Hollande a une responsabilité écrasante dans la droitisation de la société, dans le retour des préjugés contre les étrangers, les pauvres, les prétendus assistés. Il est le premier responsable de la progression du Front national.

Alors, quand il veut se faire passer pour le rempart contre le FN, il ne faut pas se faire piéger.

Cela s’appelle du chantage. Non, ce n’est pas en s’alignant derrière une politique qui fabrique le FN qu’on pourra le combattre.

Ce n’est pas la division de la gauche qui fait le lit du FN, c’est la trahison des idéaux de gauche par le PS, car le Parti socialiste ne fait pas que se discréditer en tant que parti, il contribue à démolir l’idéal porté par des générations d’exploités.

Cette trahison ne date pas d’hier. Depuis un siècle, le PS s’est vendu corps et âme à la bourgeoisie. Le Parti communiste s’est développé à ses origines en reprenant à son compte les valeurs du mouvement ouvrier, que le PS avait reniées ; mais le PC, devenu stalinien, les a reniées à son tour, pour finir, au travers de l’Union de la gauche, par
ressusciter le PS, quand ce dernier avait perdu l’essentiel de son influence dans la classe ouvrière.

Il faut que renaisse un courant dans la classe ouvrière qui reprenne à son compte les idéaux qui étaient ceux des fondateurs du Parti socialiste et du Parti communiste, les perspectives de la révolution sociale. (...)

Le FN, un danger mortel pour les travailleurs

Depuis plusieurs années, le FN capte une partie importante des déçus de la politique, qu’ils viennent de droite ou de gauche. Avec son discours contre les étrangers, Marine Le Pen touche tous ceux qui, dans la classe ouvrière, sont trop résignés pour envisager autre chose qu’un repli sur soi.

Elle se sert de la réalité de la crise, du fait qu’il faut se battre pour tout, pour trouver un emploi, un logement ou une place en crèche, pour répéter sur tous les tons « qu’on ne peut pas accueillir toute la misère du monde ».

Mais Marine Le Pen est bien placée pour savoir qu’en France ce n’est pas la misère pour tout le monde. Cette bourgeoise de Saint-Cloud, qui connaît parfaitement
le monde des riches, ses frasques, ses comptes en Suisse et les secrets de l’exploitation, se moque de la misère du monde.

Elle ne propose pas de combattre la pauvreté, elle prône la guerre entre pauvres ! À l’entendre, le chômage, les bas salaires, les déficits des caisses de Sécurité sociale, tout est de la faute des immigrés, rien du patronat, rien du grand capital qui domine l’économie. Comme si c’étaient les travailleurs immigrés qui décidaient de licencier ou de fixer les salaires au plus bas !

La politique de « préférence nationale » du FN est pain béni pour le patronat, qui rêve d’avoir à disposition une main-d’oeuvre sans droits et sous-payée, qu’il pourrait mettre en concurrence avec les autres travailleurs. Alors, si le discours du FN est tourné contre les immigrés, sa politique est contraire aux intérêts de tous les travailleurs. C’est une politique autoritaire et antiouvrière pire encore que celles menées l’UMP et le PS. (...)

Le FN est un danger pour les travailleurs. Son influence s’appuie sur la résignation de la classe ouvrière. Mais cette résignation aura une fin. Et lorsque l’abattement aura
laissé place à la colère et à l’envie d’agir, il faut qu’il y ait des militants pour que cette combativité ne soit pas dévoyée et qu’elle s’oriente contre les véritables responsables de la situation. (...)

Le FN n’est pas le seul à faire sa tambouille avec le fumier raciste et xénophobe. Il y a aussi l’UMP. En rebaptisant l’UMP Les Républicains, Sarkozy tente une opération de blanchiment et veut en même temps nous refaire le coup de l’identité nationale.

Entre le député Eric Ciotti qui réclame le retour du « droit du sang », le maire de Nice, Estrosi, qui parle de cinquième colonne islamiste, et Sarkozy qui s’oppose aux menus de substitution dans les écoles, les choses sont on ne peut plus claires. En prévision des régionales, l’UMP chasse en meute sur les terres du FN.

Au lendemain des attentats de janvier contre Charlie Hebdo et le supermarché Hyper-casher, toute la classe politique parlait de tolérance. « Il ne fallait pas avoir peur » et « ne pas tomber dans la provocation communautariste tendue par les terroristes ». Aujourd’hui, les dirigeants du FN et de l’UMP rivalisent d’attaques contre les immigrés
et d’amalgames contre les musulmans.

Ils utilisent la laïcité, c’est-à-dire un principe progressiste selon lequel la religion n’a pas à régenter la vie sociale, pour flatter les préjugés xénophobes, pour diviser les travailleurs et exclure. Car leur laïcité est toujours tournée contre les musulmans !

En usant de la terreur, les fondamentalistes cherchent à creuser un fossé de haine et d’incompréhension au sein de la population, à souder autour d’eux ceux qu’ils
estiment être leur communauté. L’UMP et le FN font de même en agitant l’identité nationale.

Les partis bourgeois qui dominent ici , et les intégristes qui veulent se tailler un fief au Moyen-Orient, représentent deux régimes différents, mais deux formes d’oppression pour les travailleurs. Ils voudraient nous amener à rejoindre leur camp en raison de notre origine, de notre nationalité ou de notre confession.

Eh bien il faut affirmer que notre camp, c’est celui de la classe ouvrière internationale.

Un aspect essentiel de notre vie et de notre identité, c’est que nous sommes des travailleurs, des manutentionnaires, des employés, des gardiens, des aides-soignantes ou des caissières. Au-delà de nos différences, nous partageons les fins de mois difficiles, les pressions des chefs et la menace du chômage. Face aux patrons, nous
avons les mêmes intérêts et les mêmes revendications. Nous formons une classe sociale qui doit se battre unie.

Il n’y a pas la classe ouvrière de France d’un côté, et les immigrés de l’autre. La classe ouvrière forme un tout. Elle est composée pour une grande part d’enfants ou de petits-enfants d’immigrés espagnols, italiens, portugais, polonais, algériens, marocains, sénégalais, ivoiriens… Et c’est sans parler de ceux qui ont été faits français sans avoir rien demandé, comme les travailleurs venus de Guadeloupe, de la Martinique ou de La Réunion.

Alors, se laisser diviser, se laisser morceler nationalité par nationalité, religion par religion, couleur de peau par couleur de peau, c’est disparaître en tant que classe, en tant que force sociale et politique. C’est se vouer à subir la domination patronale !

Alors, ne nous laissons pas diviser, occupons-nous de nos intérêts de classe, mettons en avant nos exigences et nous avancerons sur le chemin d’une société tout simplement humaine.

La mobilisation de la classe ouvrière pour ses intérêts collectifs, une nécessité contre l’offensive patronale.

Il n’y a rien à attendre des recherches diverses et variées pour recombiner la gauche et la transformer en vraie gauche ou en gauche de la gauche. Rien à attendre des ex-ministres du gouvernement, frondeurs ou pas, et de leurs amis politiques qui pensent favoriser leur carrière en se démarquant de Hollande maintenant qu’il est déconsidéré.

Rien à attendre non plus des écologistes, également ex et futurs ministres, source inépuisable de combinaisons politiciennes, y compris avec la majorité gouvernementale. (…)

Seuls des femmes et des hommes qui ne craignent pas d’aller jusqu’à contester le pouvoir de la bourgeoisie et remettre en cause les lois sacro-saintes de la propriété privée peuvent mener ce combat.

Alors, le pire serait de sacrifier cette politique de classe sur l’autel d’une alliance éphémère avec des formations politiques et des hommes dont nous savons qu’ils ne sont pas dans le camp des travailleurs et qu’ils trahiront inévitablement. Ce n’est pas de promesses et d’illusions électoralistes que la classe ouvrière a besoin, mais de lucidité pour retrouver conscience de ses intérêts et confiance en ses propres forces.

Plus on se rapprochera de l’élection présidentielle de 2017, plus les partis nous berceront d’illusions électoralistes. (...)

Le seul débouché politique pour les travailleurs sera la création d’un parti qui se situe sur le terrain de ses intérêts matériels et politiques, et qui soit capable de proposer aux travailleurs une politique de classe et révolutionnaire.

« L’émancipation des travailleurs sera l’œuvre des travailleurs eux-mêmes »

Le combat des travailleurs est difficile. Il l’a toujours été, parce que c’est un combat inégal. (...) Face à la bourgeoisie, les exploités n’ont que leurs mains, leur tête et leur volonté.

Mais avec cela ils ont  démontré qu’ils pouvaient faire de grandes choses. « L’émancipation des travailleurs sera l’œuvre des travailleurs eux-mêmes » n’est pas qu’une belle idée inventée par Karl Marx. C’est une politique que des millions d’opprimés ont mise en pratique.

Les travailleurs ont porté toutes les luttes émancipatrices du 20e siècle. Le glas de la colonisation a sonné quand les peuples algérien, indochinois se sont insurgés et ont pris les armes pendant des années. La lutte contre la ségrégation et les discriminations raciales aux États-Unis ne se résume pas à Martin Luther King ou Malcom X, elle
fut le fruit de la révolte et de la mobilisation des Noirs américains pendant deux décennies. L’apartheid en Afrique du Sud n’a été aboli que du fait d’une résistance
tenace ponctuée de soulèvements des ghettos noirs.

Les travailleurs se sont aussi battus sous leur drapeau de classe.

En France, en 1870, alors que l’armée de Napoléon III était en déroute, les Parisiens ont renversé le régime puis ont instauré leur propre pouvoir, la Commune, qui vécut 72 jours. Des gouvernements, la France en a connu des dizaines, la Commune de Paris fut le seul et unique à prendre systématiquement parti pour les pauvres contre les riches, pour les locataires contre les propriétaires, pour les exploités contre les exploiteurs.

En Russie, en 1917, pour ne plus servir de chair à canon, les paysans et les ouvriers renversèrent le tsar et mirent en place un régime qui fit la paix, distribua les terres aux paysans et libéra les peuples opprimés de l’Empire russe. La dictature stalinienne s’est imposée par la suite, mais cela n’enlève rien à ce que les travailleurs ont réalisé
par eux-mêmes.

En Espagne, en 1936, le prolétariat et la paysannerie se sont soulevés contre le coup d’État de Franco, pour se libérer de l’oppression des propriétaires fonciers. Pendant que les prétendues démocraties s’accommodaient du renforcement du nazisme en Allemagne et du fascisme en Italie, les travailleurs espagnols en lutte furent le seul espoir de faire barrage au fascisme. (...)

Aucune de ces luttes n’a permis aux exploités de se libérer de l’exploitation, mais à chaque fois les travailleurs sont repartis au combat. Et ils repartiront jusqu’à ce qu’ils brisent définitivement leurs chaînes.

Faire revivre la conscience de classe parmi les travailleurs

Aujourd’hui , comme hier, c’est avant tout dans les têtes que cela se passe. Et le combat que nous avons à mener commence dans les consciences. (...)

Aujourd’hui la classe ouvrière est émiettée, dispersée, divisée, déboussolée, elle est soumise à la propagande des différents partis bourgeois. Il faut en prendre le contre-pied. Même si , à notre petite échelle, nous ne pouvons contribuer à faire vivre ou conforter cette conscience de classe ne serait-ce que dans une petite fraction de
la classe ouvrière, il faut le faire. C’est cette conscience qui peut, dans une période de renouveau des luttes, transformer les travailleurs isolés en une classe sociale agissante et en une force politique capable de peser. (…)

Pour que la révolte se transforme en révolution, il faut des femmes et des hommes qui soient conscients des tâches à accomplir, il faut un parti communiste révolutionnaire.

On l’a vu dans le passé, les travailleurs ne fuient pas les grands combats. Eh bien il faut un parti à la hauteur de la classe ouvrière. Un parti qui se construise sur des convictions solides. Un parti qui affirme le rôle indispensable de la classe ouvrière dans la société et sa capacité à la transformer.

Un parti qui continue d’affirmer fièrement, comme les révolutionnaires qui l’ont précédé, sa confiance dans les capacités de la classe ouvrière à nous débarrasser de ce système pour bâtir une société meilleure.

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