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Roumanie : colère contre un régime corrompu
La colère de manifestants roumains contre la corruption du régime, qui a entraîné la mort d’au moins 46 personnes dans une discothèque de Bucarest, a contraint le Premier ministre Victor Ponta à démissionner mercredi 3 novembre.
Mais sa démission n’a pas suffi à désamorcer la contestation, qui va au-delà de quelques personnalités incriminées et vise plus largement un régime pourri à tous les niveaux.
Vendredi 30 octobre, un incendie s’était déclenché dans une boîte de nuit où s’entassaient 300 à 500 jeunes. L’enquête a montré des manquements flagrants à la sécurité : une seule issue, pas de sortie de secours, matériaux inflammables, autorisation de n’accueillir que 80 personnes et en tout cas pas pour des spectacles pyrotechniques, etc. Le spectacle n’aurait pas dû être autorisé. La liste des victimes risque encore de s’allonger, plusieurs dizaines de personnes étant toujours dans un état critique.
« C’est un engrenage d’incompétence, d’abus et de corruption à plusieurs niveaux qui a rendu possible cette tragédie, et cet exemple peut être multiplié à l’infini dans l’administration roumaine, que ce soit le système d’éducation, le système de santé ou l’infrastructure, ce qui explique la colère d’aujourd’hui », constate un journaliste roumain. Le Premier ministre était déjà mis en cause depuis plusieurs mois pour d’autres affaires de corruption, de faux en écriture, de blanchiment d’argent, etc. Malgré toutes ces accusations, il avait refusé de démissionner. Aussi son départ suite au drame de la discothèque n’a-t-il pas suffi à jouer le rôle de fusible escompté. Les manifestations se sont poursuivies à Bucarest durant la semaine qui a suivi, ainsi que dans plusieurs villes du pays, regroupant des dizaines de milliers de personnes, et les critiques sont allées plus loin que la simple dénonciation de la corruption. Ce sont les plus grandes manifestations que le pays ait connues depuis 1989, lors de la chute du régime de Ceaucescu.
Le président de la Roumanie, Klaus Iohannis, cherche une issue pour désamorcer le mécontentement. Après avoir nommé un Premier ministre par intérim, il organise actuellement des consultations avec les différents partis politiques pour former un nouveau gouvernement, mais comme ils sont aussi corrompus et rejetés par la population, il cherche des soutiens auprès de ce qu’il est convenu d’appeler la société civile. « Je vous ai entendus, je vais tenir compte de vos exigences », a-t-il dit aux manifestants.
Ce n’est certes pas en se contentant de changer quelques têtes que le régime gagnera la confiance de la population, même s’il pourra peut-être surmonter cette crise, en attendant d’en connaître une autre. Et cela tant qu’aucun parti ne sera vraiment en mesure de proposer une alternative à la population en colère contre la corruption.