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- Lutte ouvrière n°2477
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Editorial
Travailleurs de Goodyear : une condamnation scandaleuse !
Vingt-quatre mois de prison dont neuf mois de prison ferme et cinq ans de mise à l’épreuve ! C’est la condamnation qui a été prononcée, en première instance, par le tribunal correctionnel d’Amiens à l’encontre de huit anciens salariés et militants de Goodyear.
Que leur est-il reproché ? D’avoir retenu deux cadres de l’entreprise pendant trente heures dans une salle de réunion dans le cadre d’une lutte contre la fermeture de leur usine.
Mais s’il y avait une justice, ce sont les tribunaux qui auraient dû « retenir » les dirigeants de cette multinationale et empêcher que la rapacité du groupe fasse 1 143 chômeurs de plus. Et trente heures n’auraient peut-être pas suffi !
Au lieu de cela, les ouvriers de Goodyear se sont battus avec les seuls moyens à leur disposition, leur force collective et leur capacité de révolte. Et aujourd’hui, ce sont huit d’entre eux que la justice voudrait envoyer derrière les barreaux. C’est bien la preuve que les lois et la justice ne sont pas faites pour les ouvriers !
Les grands groupes capitalistes ont tous les droits. Leurs dirigeants mentent comme des arracheurs de dents. Ils mentent sur leurs produits, comme les affaires Volkswagen et Renault le montrent. Ils mentent sur leur situation financière alors qu’ils offrent des parachutes dorés à leurs dirigeants et des dividendes royaux à leurs actionnaires.
Ils se plaignent de payer trop d’impôts mais s’arrangent avec les paradis fiscaux. Ils dénoncent les « contraintes » qui pèsent sur eux, mais s’assoient sur bien des lois, à commencer par les règles de sécurité au travail.
Alors que toute la caste politique reconnaît que le chômage est le fléau à combattre, ces grands groupes restent libres de licencier en toute impunité.
Les licenciements, les fermetures de sites, l’aggravation de l’exploitation pour ceux qui conservent leur emploi sont devenus la source de profits la plus sûre. Et si PSA, Renault ou Goodyear comptent parmi les grands fabricants de cash pour leurs actionnaires, c’est justement parce qu’ils sont, aussi, de grands fabricants de chômeurs.
Ces mastodontes du profit ont le droit de nuire à toute la société sans être inquiétés par la justice parce que les lois sont des lois de classe. Parce que la politique menée est une politique de classe.
Après la chemise déchirée des cadres d’Air France et les déclarations infamantes de Valls à l’encontre des salariés, le gouvernement montre, une fois de plus, qu’il considère les ouvriers qui défendent leur emploi comme de vulgaires criminels. Car il n’y aurait pas eu de poursuite si le parquet avait retiré sa plainte, comme la direction de Goodyear et les deux cadres concernés l’ont fait.
Cette condamnation est donc le fait de l’acharnement du ministère de la Justice et, derrière lui, de Taubira et de Hollande.
Le même Hollande s’était rendu à l’usine Goodyear d’Amiens à l’occasion de la campagne pour la primaire socialiste. À la suite de Montebourg qui avait promis « l’interdiction des licenciements boursiers », Hollande s’était engagé à faire passer une loi permettant de sauver le site. Il avait alors insisté : « Je vous dis qu’au mois de mai, si je gagne, vous serez dans une meilleure situation pour vos luttes et votre emploi. »
Aujourd’hui, huit de ces salariés sont menacés de prison ferme. Et Hollande prétend toujours faire de la lutte contre le chômage sa priorité ! Avec cynisme, il nous fait même le coup de « l’urgence », après trois ans et demi de pouvoir, et après 41 milliards de CICE versés aux entreprises sans qu’un seul emploi ne soit créé !
Comme sous la droite, la lutte contre le chômage aura été le prétexte à de nouveaux cadeaux au patronat et à la démolition des droits sociaux.
Aujourd’hui, outre la manipulation statistique qui permettra de sortir 500 000 personnes des chiffres du chômage en les mettant en formation, le gouvernement prévoit encore d’attaquer les droits des salariés aux Prud’hommes en plafonnant les indemnités de licenciement.
Preuve supplémentaire que le gouvernement ne combat pas les licencieurs, mais les salariés menacés de licenciements. Ce n’est sûrement pas cela qui créera le moindre emploi !
Alors oui, il faut se mobiliser pour obtenir la relaxe des ex-salariés de Goodyear. Pour dénoncer cette attaque visant tous les travailleurs qui veulent défendre leur emploi. Pour réaffirmer la nécessité d’interdire les licenciements et forcer ces grands groupes richissimes à embaucher et répartir le travail entre tous, sans diminution de salaire.
C’est, pour nous tous, travailleurs, une question de survie.
Éditorial des bulletins d’entreprise du 18 janvier 2016