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Hôpitaux psychiatriques : abus d’économies
Le Centre psychothérapique de l’Ain (CPA), implanté à côté de Bourg-en-Bresse et comportant 412 lits, vient de faire l’objet d’un rapport de la contrôleure générale des lieux de privation de liberté. Après une inspection, cette institution officielle a déclenché une procédure d’urgence pour mettre fin à des abus privant les patients de certaines libertés.
Aucun patient, y compris ceux qui sont hospitalisés en soins libres, n’a libre accès au parc de l’hôpital. Dans les pavillons, les cours intérieures, bien que closes ne sont pas non plus librement accessibles.
Dans ce centre, la mise en chambre d’isolement, normalement réservée aux situations de crise, peut même devenir quasi permanente, bien au-delà de la durée des crises, qui peuvent être violentes. La contention – où le patient est sanglé au lit pour être immobilisé – est également généralisée. Les prescriptions d’isolement et de contention sont renouvelées une fois par semaine, et sans que le patient soit systématiquement examiné par un psychiatre. D’ailleurs le rapport note que « la brièveté et le caractère épisodique de la présence médicale ne permettent pas de réévaluer [les prescriptions] autant que de besoin ».
Le manque de médecins, généralistes ou spécialistes, touche bien des zones rurales et des quartiers populaires. Et quand les psychiatres manquent, cela aboutit à un enfermement abusif et inadapté aux patients.
En ce domaine la recommandation du rapport visant à « assurer une présence médicale quotidienne et d’une durée suffisante » risque de rester lettre morte tant que l’accès aux études de médecine, et donc le nombre de médecins formés, est limité.
Les économies que l’État oblige les services de santé à réaliser se traduisent par moins de personnel dans les hôpitaux. Ainsi, au CPA, le syndicat CFDT dénonce la suppression de quatorze postes d’infirmiers en un an. Moins de psychiatres, moins d’infirmiers et moins d’aides-soignants, c’est moins de contacts humains avec des patients qui en ont au moins autant besoin que des médicaments.
Les abus constatés au CPA ne sont pas limités à cet hôpital. Et l’étranglement financier de la santé publique est largement responsable de la régression de la psychiatrie hospitalière. Au point qu’enfermer les patients devient un moyen d’assurer la sécurité, tant les effectifs de soignants ont diminué.
Le rapport note que « la majorité des patients s’ennuient » et recommande de « renforcer les activités thérapeutiques afin d’en faire bénéficier le plus grand nombre de patients ». Mais le manque de personnel ne permet plus d’organiser ces activités, ni d’encadrer les patients lors de sorties. On les laisse ainsi végéter.
Pire encore, le nombre de lits d’hospitalisation ne cesse de diminuer en psychiatrie. Dans l’Ain, il a été divisé par deux en vingt ans, alors que la population du département a nettement augmenté. Le plus grand établissement du pays, à Clermont, dans l’Oise, est sous le coup d’un plan visant à faire passer le nombre de lits d’un millier à moins de 500.
Cette destruction des capacités aboutit au mieux à laisser les malades à la charge de leur famille, quand ils en ont. D’autres sont envoyés dans les établissements spécialisés en Belgique, loin de leurs proches. Et comme un rendez-vous pour une consultation prend des mois, bien d’autres ne sont simplement plus soignés, les plus malchanceux finissant à la rue ou en prison.
Ce sont les autorités, en tarissant le financement des structures hospitalières, qui désorganisent la psychiatrie publique et portent la responsabilité des abus constatés.