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Leur société
Cahuzac : les yeux dans les yeux et la main dans le sac
L’ancien ministre du Budget Jérôme Cahuzac a été condamné jeudi 8 décembre pour fraude et blanchiment de fraude fiscale à trois ans de prison ferme et cinq ans d’inégibilité. Son ex-conjointe a écopé, elle, d’une peine de deux ans de prison ferme. Cahuzac, qui a aussitôt fait appel, ne dormira cependant pas en prison, en tout cas pas tout de suite.
Le scandale Cahuzac a éclaté après les révélations de Mediapart, fin 2012, sur l’existence de comptes en Suisse et à Singapour détenus par celui qui, en tant que ministre, s’était fait le pourfendeur de la fraude fiscale.
Cahuzac nia farouchement et déclara devant les députés, « les yeux dans les yeux », qu’il n’avait aucun compte à l’étranger. L’équipe ministérielle de Hollande, le ministre de l’Économie Moscovici en tête, fit bloc autour de lui. Cependant, Cahuzac, obligé de reconnaître les faits, se retrouva mis en examen et convaincu de fraude, blanchiment et mensonges réitérés.
Depuis le début des années 1990, Cahuzac avait profité des possibilités offertes par la banque UBS en Suisse pour protéger ses avoirs, issus des activités de sa clinique de chirurgie esthétique, mais aussi de celles liées à l’industrie pharmaceutique. En effet, après avoir travaillé au cabinet du ministre de la Santé Evin de 1988 à 1991, il avait créé Cahuzac conseil, une société de lobbying pour les laboratoires pharmaceutiques. En plus de ses deux comptes chez UBS, Cahuzac était aussi à la tête de sociétés écrans à Panama et aux Seychelles, et de plusieurs millions d’euros au total.
Si la peine prononcée contre Cahuzac a été jugée sévère, c’est certainement en comparaison de la mansuétude, sinon de l’impunité dont bénéficient habituellement les riches fraudeurs du fisc. Pourtant, cette délinquance en col blanc coûte des dizaines de milliards d’euros à l’État, une somme équivalant au déficit public. Quant à la banque suisse qui hébergeait le compte de Cahuzac, elle a été condamnée à payer une amende de 1,875 million d’euros. C’est une somme bien faible au regard de ses profits, plus d’un milliard d’euros en 2015.
Selon les spécialistes, l’optimisation fiscale est en plein développement et plus de 600 milliards d’euros seraient dissimulés dans des paradis fiscaux par des particuliers et des entreprises françaises. Si Cahuzac s’est fait prendre la main dans le sac, ce n’est pas pour autant la fin de l’évasion fiscale. Pour cela, il faudrait rendre publics et transparents tous les comptes des banques et des entreprises. Et cela, aucun gouvernement au service de la bourgeoisie ne le fera.