Maroc : décès de deux jeunes mineurs à Jerada, la colère !27/12/20172017Journal/medias/journalnumero/images/2017/12/2578.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Maroc : décès de deux jeunes mineurs à Jerada, la colère !

Le 22 décembre, deux ouvriers, des frères de 23 et 30 ans, sont morts noyés dans une des nombreuses mines de fortune creusées à Jerada, l’ancienne capitale de l’anthracite du nord-est marocain, désormais une des villes les plus pauvres d’une région abandonnée. Ces deux nouveaux décès, survenant après d’autres, ont déclenché la colère de la population.

À la fermeture en 2000 de la mine d’anthracite exploitée depuis plus de soixante-dix ans par les Charbonnages du Maroc, 9 000 personnes se sont retrouvées au chômage. Il n’y a plus de travail à Jerada, ville qui compte encore 45 000 habitants. Plus assez rentable pour une exploitation capitaliste, la veine est encore creusée par des centaines des travailleurs qui n’ont que cette solution pour survivre. « Nous vivons dans une région sinistrée, où une partie des habitants n’a que le choix de creuser des puits pour subvenir à ses besoins », constate un militant de l’Association marocaine des droits de l’homme.

Comme en témoigne l’un d’entre eux dans une vidéo, avec 1 600 dirhams gagnés à l’usine (143 euros), il devait en payer 750 pour l’eau et 460 pour l’électricité. Les salaires de misère ajoutés au chômage massif conduisent ces hommes à creuser des puits sauvages, jusqu’à 30 mètres de profondeur, puis des galeries étroites laissant à peine la place de se glisser. Les sacs de charbon sont remontés par des collègues à l’aide d’un treuil, d’une corde, d’un vieux pneu et évidemment des mains. Parfois, un compresseur envoie de l’air au fond par l’intermédiaire d’un tuyau d’arrosage.

Les autorités locales comme l’État ferment les yeux sur ces conditions de travail d’un autre âge. Elles ne délivrent pas d’autorisation, mais sont forcément au fait de ce que le charbon extrait – environ 100 tonnes par jour au su de tous – est transporté sur des charrettes tirées par une mule et vendu aux briquetteries, aux propriétaires de fours, aux hammams et ce jusqu’à Casablanca, à 600 kilomètres de là. Selon les habitants, des mafias prospèrent sur ce commerce. Régulièrement, plusieurs fois par mois parfois, des ouvriers meurent, des pieds ou des mains sont écrasés.

Cette fois, la colère de la population s’est manifestée. Les difficultés à remonter les corps à la surface, assumées essentiellement par les amis et voisins, la colère de la famille, aggravée semble-t-il par les tentatives des autorités locales de se soustraire à une enquête sur les conditions de la noyade, avaient de quoi déclencher des manifestations les jours suivants. Les magasins et les écoles de Jerada ont été fermés et une grève générale proclamée contre « l’abandon, l’injustice et la marginalisation » du côté du pouvoir. Le prix de l’eau et de l’électricité sont à nouveau dénoncés et les slogans du Rif se sont fait entendre lors des manifestations : « Dignité, dignité ! »

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