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Leur société
Logement : l’État se décharge sur les communes
En décembre dernier, le gouvernement s’était félicité d’une production record de logements sociaux les trois années précédentes dans les communes déficitaires. Dans son rapport annuel, la Fondation Abbé Pierre tempère cet enthousiasme.
Plus de la moitié des communes déficitaires, 649 sur 1 152, n’ont pas atteint le niveau de construction imposé par la loi SRU (solidarité et renouvellement urbains) qui fixe des paliers pour atteindre un objectif de 25 % de logements sociaux d’ici à 2020 dans les communes moyennes et les agglomérations. Cela n’a pas empêché le gouvernement de présenter comme positif le résultat global avec 190 000 logements sociaux financés ou mis en service en trois ans, entre 2014 et 2016, dans les communes déficitaires. Les objectifs globaux de la loi SRU auraient été réalisés à 106 %.
La Fondation Abbé Pierre ne conteste pas ces chiffres mais les éclaire d’un jour intéressant. Parmi les communes récalcitrantes, certaines revendiquent auprès de leur électorat de payer l’amende prévue par la loi, même en augmentation. Elles se font fort de ne pas accueillir les pauvres, si bien que depuis le temps le préfet a établi quatre ou cinq constats de carence mais se garde bien, comme prévu par la loi, de se substituer au maire pour délivrer les permis de construire et faire émerger les logements sociaux qui manquent.
D’autres communes échappent à l’amende en signant avec l’État un accord peu contraignant. D’autres encore construisent des logements dits sociaux mais quasi exclusivement ceux aux loyers les moins subventionnés, les PLS, inaccessibles aux ménages qui n’ont pas de bons salaires, bien que la loi SRU ait été modifiée pour limiter ce trucage. « Le ministère doit faire preuve de la plus grande fermeté à l’égard des communes mais aussi à l’égard des préfets », conclut la Fondation Abbé Pierre.
En fait, la loi SRU dont le gouvernement PS de Jospin avait fini par accoucher en fin de mandat en décembre 2000 masquait l’absence de volonté politique de l’État pour construire directement les logements financièrement accessibles qui manquent. Les gouvernements qui ont suivi, y compris ceux de droite, n’ont pas remis en cause cette loi, bien pratique pour reporter leur responsabilité sur les communes. Celles qui construisent des logements sociaux doivent garantir les prêts que les HLM sollicitent auprès des banques. Elles payent aussi les écoles et autres services collectifs supplémentaires destinés aux nouveaux habitants.
Le gouvernement Macron privant les organismes HLM, en particulier ceux qui logent les ménages les plus pauvres, d’une partie de leurs ressources, les communes seront sollicitées pour faire un effort supplémentaire, au moment même où les finances de nombre d’entre elles sont mises à mal par l’État.
Les communes qui ne veulent que des habitants pouvant payer des loyers élevés peuvent ainsi continuer à le faire sans que les préfets interviennent comme ils savent le faire quand il s’agit d’expulser des habitants trop pauvres pour payer leur loyer.