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Dans les entreprises
OpenHydro – Cherbourg : une turbo fermeture
À Cherbourg, l’usine OpenHydro a fermé, six semaines seulement après son inauguration. Le motif invoqué pour la fermeture est l’absence de marché et le désengagement de l’État.
Les hydroliennes marines sont des turbines immergées en mer, capables de transformer en énergie électrique le mouvement de l’eau. L’idée est belle. L’énergie marine est renouvelable, constante et prévisible (contrairement au vent). De l’idée à la pratique, il y a encore beaucoup d’études, de prototypes, d’essais en mer à réaliser, et donc de dépenses, sans certitude absolue de réussite.
C’est là que l’État intervient. Aux USA, au Canada, au Japon, en Grande-Bretagne, le concept a intéressé un peu partout de petites entreprises, avec derrière elles de grands groupes à l’affût de profits futurs et le soutien de fonds publics.
En France, à coups de « filière d’avenir » et de « plan AMI » (appel à manifestation d’intérêt, c’est joliment dit), l’État a fait savoir qu’il était prêt à banquer. L’aventure OpenHydro est une des tentatives qui en sont nées. Petite société irlandaise de 100 salariés spécialisée dans l’hydrolien, OpenHydro a été racheté en 2013 par la DCNS, aujourd’hui NavalGroup, société de droit privée héritière des arsenaux militaires, contrôlée à 62 % par l’État et à 35 % par Thales, dans lequel l’État est encore présent à 25 %. NavalGroup a mis OpenHydro dans une sous-société, Naval Energies, où est entré BPI France, bras financier de l’État pour apporter du capital à des PME innovantes… ce qui n’est pas précisément le cas de NavalGroup.
L’usine de Cherbourg est louée à la Shema, société d’économie mixte régionale, pour les trois quarts à capitaux publics, qui « assure le relais là où l’entreprise privée ne se risquerait pas », ainsi que l’indique son site Internet. La Shema a sorti 50 millions pour construire cette usine conforme aux besoins d’OpenHydro.
Autant dire que l’argent public a coulé à flots. Seulement voilà, le marché s’est retourné avant même d’avoir pris. En deux ans, le prix du kWh éolien ou solaire, lui-même très subventionné, a beaucoup baissé, suffisamment pour tuer dans l’œuf et pour longtemps la rentabilité des hydroliennes. Depuis, c’est partout la débandade et l’État français est resté quasiment seul, avec un projet de huit hydroliennes, qu’il n’a toujours pas confirmé. Voilà pourquoi Naval Energies a annoncé le 26 juillet la fermeture de l’usine OpenHydro, inaugurée le 15 juin précédent !
On voit là comment l’État sert les capitalistes : il prend les risques à leur place tant que les profits ne sont pas assurés, avant de leur céder le contrôle. Dans le cas présent, il a peut-être choisi d’arrêter les frais sans se préoccuper de la recherche dans la production d’énergie ou de la vie des salariés concernés.