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Kurdes de Syrie : otages de la politique impérialiste
Mercredi 9 octobre, la Turquie a lancé une offensive militaire contre le Rojava, la zone kurde autonome du nord de la Syrie. Le gouvernement Erdogan s’est visiblement senti autorisé à mener cette attaque après les communiqués de Trump annonçant le retrait des troupes américaines de cette zone.
Il est vrai que Trump avait contrebalancé ses déclarations en menaçant de détruire l’économie turque si la Turquie « dépassait les limites ». Mais pour les Kurdes la menace était claire.
Ils sont 30 à 40 millions, dispersés sur plusieurs pays, essentiellement la Turquie, l’Irak, l’Iran et la Syrie. Privés de droits nationaux et opprimés, les Kurdes ont espéré voir leur situation s’améliorer après les guerres en Irak et en Syrie. Le Kurdistan autonome irakien existe officiellement depuis 2005, et depuis 2012 les Kurdes de Syrie ont pu, eux aussi, gérer le territoire autonome du Rojava, qui constitue l’ouest du Kurdistan revendiqué par les nationalistes. Il a fait la une de l’actualité lors de la bataille de Kobané en 2014-2015, quand les combattants des YPG (Unités de protection du peuple) ont résisté à l’avancée de l’État islamique, ou lors de l’attaque contre Afrin (entre janvier et avril 2018), quand à l’inverse ils ont été repoussés par l’armée turque.
Les États-Unis se sont appuyés sur les milices kurdes syriennes, les YPG, pour lutter contre l’organisation État islamique (EI) dans la région. Onze mille combattants kurdes ont péri dans ces combats. Ces milices se chargent encore aujourd’hui de maintenir en détention 10 000 membres des milices de l’EI. Mais, l’organisation État islamique ne semblant plus présenter un danger, l’intérêt d’une alliance avec ces milices kurdes syriennes a considérablement diminué, d’autant que les dirigeants impérialistes ont besoin de la Turquie pour maintenir un certain ordre dans la région. Or Erdogan veut absolument s’opposer à l’autonomie des Kurdes syriens.
Les dirigeants américains pourraient maintenant lâcher complètement les milices de l’YPG, après les avoir utilisées contre l’EI. Ce ne serait pas la première fois que l’impérialisme opérerait un tel retournement.
Ainsi, en 1991 et sans remonter plus loin, lors de la première guerre du Golfe, les dirigeants américains avaient appelé le peuple irakien à se soulever contre Saddam Hussein, coupable de les avoir défiés en occupant le Koweït. Cela entraîna une insurrection kurde, que les dirigeants américains laissèrent l’armée de Saddam Hussein réprimer, avec la complicité de toutes les autres puissances impérialistes, dont la France. Ce n’est qu’une fois assurés que tout risque révolutionnaire était écarté qu’ils protégèrent le Kurdistan irakien, ce qui lui permit de gagner une autonomie bien fragile et toujours susceptible d’être remise en question.
L’autonomie conquise au Rojava à la faveur des combats est maintenant remise en cause par la politique impérialiste, qui ne défend les droits des peuples qu’en fonction de ses besoins et de l’évolution de ses alliances.