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Leur société
Vaccins : une guerre meurtrière
En conflit avec le fabricant de vaccins AstraZeneca, l’Union européenne (UE) menace de bloquer ses exportations hors de l’Union s’il ne la livre pas en priorité. Cela vise directement le Royaume-Uni, mieux servi par le groupe anglo-suédois. En fait, faute de contraindre les groupes pharmaceutiques à produire vite les quantités de vaccins nécessaires pour tous, les États en sont à se chaparder la misère.
Dès le début de la crise sanitaire, cette course aux vaccins a commencé pour tenter non seulement d’obtenir les doses nécessaires pour vacciner la population, mais aussi pour favoriser les trusts nationaux des États contre ceux des concurrents. Les États-Unis avaient une longueur d’avance grâce à des groupes américains comme Pfizer et Moderna. Le Royaume-Uni a négocié très tôt avec AstraZeneca en payant des tarifs élevés pour avoir un accès prioritaire aux vaccins. Quant à la réaction collective de l’UE, elle a été pour le moins laborieuse. Un comité de pilotage a été créé, avec sept « négociateurs » provenant de sept pays différents (Allemagne, France, Italie, Pays-Bas, Suède, Espagne, Pologne) qui se sont réparti les contrats « en fonction des intérêts ou de la curiosité de chacun des États » comme l’a déclaré le négociateur français. Évidemment, ce sont les trusts européens qui ont été favorisés. Mais parmi tous les contrats passés par l’UE, seul celui avec AstraZeneca a abouti pour l’instant à la commercialisation d’un vaccin.
L’UE a donc fini par passer aussi des contrats avec Pfizer et Moderna mais tardivement, au moment où ceux-ci sont sortis sur le marché, et pour des quantités au départ moins importantes. Ce n’est que maintenant que l’Allemagne évoque la possibilité de commander des doses du vaccin russe Sputnik V. Et les pays européens qui ont acheté celui-ci, ou encore des vaccins chinois, l’ont fait malgré la pression de l’UE.
Aujourd’hui, il y a presque quatre mois que les premiers vaccins sont sortis. Mais la pénurie ne se résorbe pas car les trusts pharmaceutiques sont plus que jamais en guerre les uns contre les autres et peuvent compter sur leur État pour les soutenir. La solidarité proclamée entre les États européens ne les empêche pas de négocier en ordre dispersé. La priorité donnée en théorie à la santé ne les empêche pas non plus de faire la fine bouche, pour des raisons politiques, devant les vaccins russe, chinois ou même cubain.
Les moyens de production sont là, mais nulle part il n’a été question de les réquisitionner pour produire coûte que coûte la quantité nécessaire de vaccins. Pourtant, comme l’a rappelé un médecin qui lance l’alarme sur la situation dans les hôpitaux : « 100 000 personnes vaccinées aujourd’hui plutôt que demain, ce sont 40 morts de moins. »