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Dans les entreprises
Airbus – Toulouse : un licenciement qui ne passe pas
Après six jours de grève pour protester contre le licenciement de l’un d’entre eux, les peintres ont repris le travail à l’usine Airbus de Toulouse, fiers d’avoir marqué le coup contre ce qu’ils ont estimé être une décision injustifiée et scandaleuse.
Fin septembre, en salle de Peinture C32, leur camarade s’était vu reprocher de ne pas avoir mis son harnais de sécurité. Aussitôt, il l’avait mis. Un peu plus tard, alors qu’il faisait un aller-retour pour aller chercher un rouleau de scotch qu’il avait oublié dans l’avion, on l’a repris de nouveau concernant le harnais.
Jeudi 2 novembre, la sanction est tombée, alors que la production se faisait à effectifs réduits à cause du pont. Une demi-heure après sa prise de service, la direction a signifié son licenciement à ce travailleur, qui a été raccompagné par la sécurité à l’extérieur de l’usine, entouré de six vigiles et deux voitures, comme un criminel. Aussitôt ses collègues, même peu nombreux, ont décidé d’arrêter le travail. Dans les salles de Peinture, l’émotion était grande et le mouvement s’est étendu, en particulier parmi les équipes de VSD (vendredi-samedi-dimanche). Le lundi suivant, tous les peintres en CDI étaient en grève. Dans toute l’usine, en particulier à la production, les travailleurs, en apprenant la nouvelle, ont été extrêmement choqués de l’attitude de la direction. Les discussions étaient très nombreuses et la réprobation générale : « La sanction est disproportionnée, ça cache quelque chose. » D’autant plus que, dans sa communication pour justifier ce licenciement, la direction n’a pas hésité à mentir sur les faits. Certains chefs ont même osé dire : « Il vaut mieux être licencié que mort. » Quel cynisme !
En matière de sécurité au travail, quelle hypocrisie ! Cela fait des années que la direction conteste systématiquement les accidents de travail. Combien de fois, tel ou tel ouvrier s’est entendu dire : « Ne déclare pas ton accident de travail ; on va te trouver un poste aménagé. » Du coup, beaucoup continuent à venir malgré un mal de dos. On voit de plus en plus de travailleurs venir au travail le bras en écharpe, un strap à une jambe. Certains se sont même vu demander de se mettre en télétravail. Si le travailleur veut malgré tout se mettre en arrêt, il reçoit un document d’une dizaine de pages où il doit prouver qu’il s’est vraiment fait mal dans le cadre de son activité professionnelle. De plus, un témoin doit attester de la véracité de ses propos par écrit, dans un document du même genre.
Cet autoritarisme ne passe pas. Contrairement à ce que la direction veut faire croire, les travailleurs ne « se mettent pas volontairement en danger », ainsi que l’a dénoncé la CGT dans un tract largement distribué. Tous savent que dans bien des secteurs, alors que certaines tâches sont extrêmement dangereuses par manque de protection collective ou parce que l’outillage est non conforme, la direction traîne la patte pour prendre les mesures nécessaires, et cela malgré les multiples signalements.
Malgré cela, quand survient un accident grave, Airbus n’est jamais responsable, et encore moins sanctionné. Les anciens se souviennent d’un accident qui a eu lieu il y a dix ans, en salle de Peinture C35. Le système de commande de la plateforme sur laquelle travaillaient quatre peintres avait brutalement lâché. Si l’un d’eux avait pu se retenir aux câbles, les trois autres avaient basculé dans le vide. À l’époque, beaucoup de questions se posaient : pourquoi les peintres n’avaient pas de harnais les retenant à la plateforme ? Pourquoi ne portaient-ils pas de casque ? Pourquoi, alors que des dysfonctionnements avaient déjà été signalés, rien n’avait été fait ? Aujourd’hui, on en est toujours à chercher la responsabilité entre Airbus et le fabriquant des nacelles ! Mais force est de constater que la justice est loin d’être du côté des travailleurs.
Licencier un travailleur en prenant prétexte de la sécurité n’est pas une nouveauté à l’usine. Mais, cette fois, beaucoup ont senti que l’intransigeance de la direction traduisait une volonté de mettre au pas de l’ensemble des travailleurs. Les peintres ont réagi, avec raison, à cette attaque patronale contre l’un des leurs.