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- Lutte ouvrière n°2889
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Leur société
Le RN et le patronat : les yeux doux de Le Pen aux possédants
Le quotidien des milieux d’affaires, Les Echos, a consacré un éditorial, le 3 décembre, au Rassemblement national qui « lance une offensive » en direction « des chefs d’entreprise en faisant miroiter des adaptations discrètes de son programme ».
La dernière illustration en serait que Marine Le Pen vient d’inviter Henri Proglio dans un restaurant que ce journal qualifie de « table du Tout-Paris ». Ce grand patron a été entre autres PDG de Veolia, puis d’EDF, et a présidé le conseil d’administration de Thales.
L’opération visait donc à être connue des milieux qui ont les moyens de fréquenter ces établissements huppés : ceux du grand patronat. C’est à eux que Marine Le Pen s’adresse de façon plus ou moins discrète mais systématique depuis des mois.
Récemment, Chenu, porte-parole du RN, et Tanguy, chef de ses députés, se sont affichés avec Michel-Édouard Leclerc et Dominique Schelcher, le PDG de Système U. Fin novembre, Bardella, le président du RN, était à une soirée-débat à HEC, grande école où sont passés beaucoup de dirigeants patronaux, et au Salon de la CPME (Confédération des petites et moyennes entreprises). Dans les régions, « les élus [du RN] sont de toutes les fêtes et rencontres de patrons locaux », soulignent Les Echos.
Les liens de Le Pen père et fille avec les nantis ne datent pas d’hier. Le père, fondateur du Front national, avait hérité de la fortune du cimentier Lambert en 1976, et de nombreux sympathisants fortunés naviguaient dans les eaux du FN. Mais, sauf exception, les sommets de la bourgeoisie ne s’affichaient pas à ses côtés. Et Geoffroy Roux de Bézieux, ex-président du Medef, déclarait il y a peu encore que Marine Le Pen n’avait « aucune compétence économique ».
Celle-ci et le RN aime- raient passer pour les défenseurs des petites gens, pour gagner des voix. Mais même le succès sur ce terrain ne suffit pas pour pouvoir accéder à la direction du pays. Car il faut pour cela que la haute bourgeoisie, qui détient le pouvoir véritable car elle tient l’économie et la finance, donne son feu vert à une Le Pen, comme la bourgeoisie italienne l’a fait pour Giorgia Meloni.
Certes, Marine Le Pen défend fondamentalement la classe dominante, notamment quand elle veut diviser la classe ouvrière avec sa démagogie xénophobe et réactionnaire. Mais elle doit faire des gestes pour convaincre le patronat qu’il aurait plus à gagner qu’à perdre en la laissant accéder aux affaires. C’est ce qu’elle essaye de faire en ne parlant plus d’abandonner l’euro ou de rompre avec l’Europe, ce que les grandes entreprises refusent, au moins pour l’heure.
Quand la gamelle s’approche, le toutou se fait plus obéissant.