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Dans les entreprises
Casino : la dictature des actionnaires
Dimanche 17 décembre, 2 500 personnes ont manifesté à Saint-Étienne, contre le dépeçage annoncé du groupe Casino, qui menace 50 000 travailleurs en France et 200 000 dans le monde.
Dans cette ville où se trouvent le siège, un entrepôt et de nombreux magasins du groupe, l’inquiétude est grande : qui va être repris, qui va être licencié ? Et que vont devenir les générations futures dans une région déjà sinistrée ?
Dans cette ville ouvrière, l’affaire rappelle à beaucoup les fermetures passées : Manufrance, Creusot-Loire, Giat ou les mines, et bien d’autres plus récentes, comme chez l’équipementier automobile ZF-Mécacentre. Chaque fois, les travailleurs ont été sacrifiés mais les fortunes des bourgeois qui possédaient ces entreprises ont été préservées.
Pendant des années, le groupe Casino a enrichi des familles d’actionnaires, les Guichard, fondateurs du groupe ou les Kemlin. Leurs fortunes se sont bâties sur l’exploitation de générations de travailleurs, dans les magasins, les entrepôts, les camions et les bureaux. Dans les années 1990, l’actuel PDG Jean-Charles Naouri a multiplié les rachats de sociétés, en s’endettant toujours plus. Ancien haut-fonctionnaire dans des cabinets de gouvernements sous Mitterrand, Naouri est devenu lui-même un financier, s’enrichissant du travail des salariés du groupe Casino à l’échelle internationale.
Depuis des années, autour de ce groupe, une guerre économique s’est engagée entre capitalistes de la distribution et de la finance, pour racheter ou revendre des enseignes à tour de bras et créer des holdings financières. Cette guerre a fait gonfler la dette du groupe jusqu’à plus de 6 milliards d’euros. Après avoir prélevé leur part, les actionnaires et les banques ont exigé le remboursement des dettes. Naouri a revendu ses parts au milliardaire tchèque Kretinsky qui a aussitôt annoncé la vente à la découpe du groupe. Ces annonces ont aiguisé les appétits des concurrents, Intermarché, Auchan, Lidl et Carrefour, fait plonger les actions et élargi le périmètre du dépeçage de Casino.
Dans la presse locale, les élus – le maire LR, le député macroniste et d’autres – se répandent avec leurs « solutions ». Le 17 décembre, ils se pavanaient en tête de la manifestation. La gauche en appelait à l’« union sacrée » et demandait au gouvernement de « prendre ses responsabilités » tandis que les discours des responsables syndicaux étaient de la même eau. Tous en appellent aux mânes du fondateur de Casino Geoffroy Guichard, présenté comme un « patron visionnaire », et ils demandent à Macron, ou au repreneur milliardaire Kretinsky, d’être aux côtés des salariés. Au rassemblement se trouvait même Xavier Kemlin, arrière-petit-fils de Geoffroy Guichard, qui sort de son chapeau un prétendu plan de reprise. Des ennemis des travailleurs sont ainsi présentés comme ceux qui pourraient apporter une solution !
Casino est présenté comme un emblème de Saint-Étienne, au point que le stade de football se nomme Geoffroy-Guichard. Aujourd’hui la marque est surtout à l’image d’une société capitaliste folle où la production comme la distribution des marchandises indispensables à la vie quotidienne se marchandent entre capitalistes en quête de profits.