Aide sociale à l’enfance : une catastrophe programmée17/12/20252025Journal/medias/journalnumero/images/2025/12/une_2994-c.jpg.445x577_q85_box-0%2C0%2C1271%2C1649_crop_detail.jpg

Leur société

Aide sociale à l’enfance : une catastrophe programmée

Une vidéo montrant un enfant de huit ans tondu par une éducatrice et une émission de télévision dénonçant la prostitution des mineures ont remis dans l’actualité la situation catastrophique de l’aide sociale à l’enfance (ASE).

La succession, ces dernières années, de récits d’enfants maltraités, de protestations d’éducateurs sans moyens ou de juges sans solution et même de jeunes morts d’avoir été confiés à l’ASE avait finalement débouché sur une enquête parlementaire. Son rapport, rendu le 1er avril 2025, est accablant. Parmi les 400 000 enfants placés à l’ASE, on trouve les trois quarts des 20 000 jeunes qui se prostituent, et la moitié des enfants suivis en hôpital psychiatrique. Une bonne partie d’entre eux deviennent des jeunes adultes sans domicile fixe.

Les parlementaires ont également relevé que le passage par l’ASE entraîne une perte de 20 ans d’espérance de vie et nombre d’autres statistiques aussi révoltantes. En outre, les moyens alloués à cette institution sont tellement réduits que des juges pour enfants se trouvent souvent sans solution de placement et donc contraints de renvoyer l’enfant en danger au foyer même où il est menacé. Les éducateurs sont en permanence débordés et des jeunes gens sont, de fait, laissés à eux-mêmes dans des foyers voire dans des chambres d’hôtel. Les députés soulignent évidemment que le transfert depuis 1983 de l’aide à l’enfance aux départements, suivi de la réduction constante depuis trente ans des moyens accordés à ces derniers, place l’ASE dans l’impossibilité matérielle de faire face.

Le rapport n’a pourtant eu pour conséquences que de nouveaux discours. Le 1er décembre, le ministre de la Justice Darmamin et sa collègue à la Santé Rist ont annoncé un projet de loi pour refonder la protection de l’enfance. Il devrait être présenté au gouvernement puis aux députés au printemps 2026. « Nous garantirons à ces enfants un véritable projet de vie » peut-on lire dans ce projet. Mais il est spécifié, en préambule, que cette loi n’ouvre pas d’enveloppe budgétaire spécifique, ce qui réduit à rien les promesses ministérielles.

D’autre part, le 11 décembre, les députés ont voté à l’unanimité des présents un texte garantissant un avocat à chaque enfant soumis à l’assistance éducative. C’est se décharger à peu de frais de leurs responsabilités et soulager aisément leur conscience : l’ASE n’a même pas de quoi fournir un sandwich à chaque enfant placé sous sa garde, alors un avocat…

En France, depuis juillet 2024, douze enfants placés sont morts, des milliers se sont prostitués parfois simplement pour avoir de quoi manger, la plupart ont été maltraités et tous ont peur du lendemain. Dans le même laps de temps, les crédits militaires ont été augmentés, les aides aux grandes entreprises poursuivies, les profits des milliardaires confortés.

Ceux qui font les lois et votent les budgets ont certainement une explication à ce curieux paradoxe. Qu’ils essaient donc d’en convaincre les 400 000 enfants placés sous la protection de l’État et donc sous la leur.

Partager