Allemagne : crise politique et élections anticipées27/11/20242024Journal/medias/journalnumero/images/2024/11/une_2939-c.jpg.445x577_q85_box-0%2C7%2C1265%2C1644_crop_detail.jpg

Dans le monde

Allemagne : crise politique et élections anticipées

Mercredi 6 novembre, le gouvernement allemand a éclaté, après trois ans de disputes entre les partis qui se partagent le pouvoir : SPD (sociaux-démocrates), Verts et libéraux (FDP). Les annonces de licenciements et fermetures d’usine dans l’industrie lui ont donné le coup de grâce.

La montée de la crise économique a fait que ces partis ont déçu leurs électeurs plus vite que d’habitude. En 2021, le FDP avait promis à son électorat de réduire les dépenses publiques, surtout sociales, pour baisser les impôts des riches. Au lieu de quoi, l’endettement public a fortement augmenté depuis qu’il participe au gouvernement. Les Verts disaient faire avancer leur prétendue « politique pour le climat » : ils ont été les plus va-t-en-guerre, ont acheté du gaz dans le monde entier et cessé de promouvoir les voitures électriques. Scholz (SPD) avait été élu chancelier « social » et a dépensé des centaines de milliards pour l’armement et les cadeaux aux multinationales, alors que dans le pays des ponts s’effondrent et des hôpitaux ferment.

Une conséquence en est la montée de l’AfD (extrême droite), visible lors des trois élections régionales de septembre. Depuis, tous les partis se trouvent d’accord sur un point : accuser les migrants d’être responsables des problèmes que traverse le pays, et durcir les conditions d’immigration. Le chancelier Scholz fait passer l’une après l’autre des mesures rendant leur vie plus dure : diminution des aides, rétablissement des contrôles aux frontières, hausse des expulsions vers le pays d’origine. Les partis se livrent sur ce thème à une surenchère sans fin, qui dégrade continuellement le climat politique.

L’étincelle qui a définitivement fait exploser la coalition a été la crise de l’industrie automobile. Les annonces violentes de Volkswagen (VW) décidant de dénoncer les conventions collectives et de fermer jusqu’à trois usines en Allemagne ont créé une onde de choc. Aucun des trois géants de l’automobile, VW, Daimler et BMW, n’avait jamais fermé d’usine en Allemagne et nombre de leurs salariés pouvaient penser que cela n’arriverait qu’aux autres. Daimler et BMW ainsi que les sous- traitants Schaeffler, ZF et Bosch ont tous annoncé eux aussi des « baisses drastiques » et « coupes sévères ».

Les menaces et déclarations de guerre aux salariés servent aussi à extorquer de nouveaux cadeaux au gouvernement. Ainsi les patrons, en collaboration avec les syndicats, ont dicté à Scholz le détail de ce qu’ils attendent. Le SPD a accepté, quitte à augmenter davantage la dette publique.

Le FDP, dont les scores électoraux se sont effondrés, n’atteignant plus qu’autour de 1 % lors des trois élections régionales de septembre et se trouvant éjecté des Parlements, s’est opposé à ces plans. Son dirigeant, Lindner, a vitupéré toujours plus fort le gouvernement auquel il appartenait. Sa proposition est que les groupes automobiles puissent produire sans limite dans le domaine des émissions de CO2 ; il veut baisser les retraites et le revenu de citoyenneté, l’équivalent du RSA, pour réduire les impôts des catégories aisées et des entreprises.

Finalement, FDP et SPD, plutôt que de faire fuir encore plus leurs électorats respectifs, ont préféré provoquer de nouvelles élections, qui auront lieu en février 2025. Le SPD, les Verts aussi, espèrent obtenir suffisamment de voix pour continuer à gouverner... y compris avec les conservateurs de la CDU. Le dirigeant de celle-ci, Friedrich Merz, un ancien de BlackRock, se réjouit de la perspective d’atteindre la mangeoire plus tôt que prévu. Mais la crise économique ne s’arrêtera évidemment pas là.

À tout cela s’est ajouté, le 25 novembre, l’annonce de la suppression à venir de 11 000 postes par le géant de l’acier, ThyssenKrupp.

On peut prévoir que le cirque politicien se poursuivra avec la prochaine coalition, quelle qu’elle soit, écoeurant sans doute un peu plus la population, au profit de l’extrême droite. Ce n’est certes pas de ce côté que les travailleurs, surtout inquiets des menaces que font peser sur eux les géants de l’industrie, trouveront des perspectives.

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