Chine-Taïwan : une tension alimentée par l’impérialisme17/10/20242024Journal/medias/journalnumero/images/2024/10/une_2933-c.jpg.445x577_q85_box-0%2C7%2C1265%2C1644_crop_detail.jpg

Dans le monde

Chine-Taïwan : une tension alimentée par l’impérialisme

Lundi 14 octobre, la Chine a organisé autour de Taïwan des manœuvres militaires mobilisant un nombre record d’avions et de navires de guerre. Elle affirmait répondre ainsi à un discours « séparatiste » de Lai Ching-te, le président de Taïwan.

Jeudi 10 octobre, Lai Ching-te s’était ainsi engagé à « résister à l’annexion » chinoise de l’île ou « à l’empiétement de sa souveraineté », des propos qui, parce qu’ils laissent entendre que Taïwan est officiellement indépendante, remettent en cause le statu quo établi entre les États-Unis, la Chine et Taïwan depuis 1979.

À la fin de la révolution de 1949, alors que les armées paysannes de Mao prenaient les villes les unes après les autres, Tchang Kaï-chek et ses hommes du Kuomintang, massacreurs d’ouvriers, vomis par la population chinoise, ne purent que se réfugier à Taïwan, sous protection américaine. Alors que la Chine de Mao était mise sous embargo, ce n’est pas Pékin mais Taïwan qui, avec ses quelques millions d’habitants, fut pour des années reconnu par l’impérialisme comme la Chine officielle, occupant un siège au Conseil de sécurité de l’ONU.

Taïwan est donc depuis lors un atout entre les mains de l’impérialisme contre la Chine, et a même été une base arrière pour les États-Unis dans les guerres de Corée et du Vietnam. Cette île, présentée comme le rempart de la démocratie contre le communisme chinois, a toujours été un bagne pour la classe ouvrière. Les années 1950 à 1990 furent celles de la Terreur blanche, 140 000 oppositionnels furent emprisonnés, entre 3 000 et 4 000 exécutés. La loi martiale ne fut levée qu’en 1987, ce qui permit au régime de se donner une façade démocratique à partir des années 1990. Si le Kuomintang a cédé le pouvoir au PDP, le parti de Lai Ching-te, la statue de Tchang Kaï-chek trône toujours dans la capitale Taïpei et l’appareil militaro-policier à l’œuvre pendant les décennies de terreur charpente toujours l’État.

En 1979, le rapprochement entre la Chine et les États-Unis amorcé au début des années 1970 amena ces derniers à reconnaître Pékin comme la capitale chinoise, à lui attribuer la représentation de la Chine à l’ONU et son siège au Conseil de sécurité. Le statu quo qui s’établit alors a consisté à considérer qu’il n’y avait qu’une seule Chine dont Taïwan faisait partie, tout en tolérant son indépendance de fait, au nom d’une réunification à réaliser dans un avenir non défini. L’officialisation de l’indépendance de Taïwan fut dès lors une ligne rouge dont Pékin ne tolérait pas le franchissement. En même temps, l’impérialisme américain s’engageait auprès du régime taïwanais à le fournir en armes et à assurer sa protection, faisant de Taïwan l’un de ses moyens de pression les plus efficaces contre le régime chinois.

Le PDP aujourd’hui au pouvoir est un parti bourgeois, libéral, corrompu jusqu’à la moelle. Il affirme dans son programme que Taïwan doit devenir officiellement indépendante. Taïwan et ses 23 millions d’habitants n’ont certes pas les moyens d’une guerre avec la Chine. Aussi les déclarations de ses responsables dans le sens de l’indépendance sont rares et faites au gré de leurs besoins de politique intérieure. Il peut s’agir de faire oublier leur discrédit ou de répondre au besoin de l’impérialisme américain de démontrer que c’est la Chine qui représente le danger.

D’ailleurs, à l’issue des manœuvres chinoises, le porte-parole du département d’État américain, Matthew Miller, a appelé la Chine « à éviter toute nouvelle action susceptible de compromettre la paix et la stabilité dans le détroit de Taïwan et la région dans son ensemble ». Mais depuis plusieurs années, ce sont bien les États-Unis qui ont accéléré les livraisons d’armes à Taïwan et qui multiplient les exercices militaires dans la région.

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