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Leur société
Mayotte : un après-cyclone catastrophique
Après que le cyclone a dévasté Mayotte, le 14 décembre, la gestion de la catastrophe met en lumière l’incurie de l’État français. Alors que Chido était annoncé, rien n’a été anticipé par les autorités : les secours et approvisionnements d’urgence ont mis des jours pour arriver.
Les toutes premières distributions ont été organisées le 18 décembre dans quelques communes. Sur Petite-Terre, chaque foyer avait droit à deux bouteilles d’eau, deux boîtes de thon et deux boîtes de sardines… Et encore fallait-il présenter une pièce d’identité pour bénéficier de ces rations insuffisantes !
De nombreux villages sont encore coupés du monde, sans eau ni électricité. Dans les bidonvilles, les survivants n’ont vu arriver aucun secours. C’est pourtant là que le nombre de victimes est le plus grand. Craignant les chasses à l’homme organisées par la préfecture pour expulser chaque année 25 000 personnes vers les îles des Comores voisines, la grande majorité des habitants n’a pas voulu se réfugier dans les abris publics. Certains ont même pensé que l’alerte au cyclone était une fausse information, destinée à leur tendre un piège pour les rafler.
Cette politique xénophobe a sans doute provoqué des milliers de morts. Le 23 décembre, la préfecture annonçait encore 35 morts recensés tout en précisant que ce bilan n’était pas définitif. Mais les premiers secours, constatant la situation des bidonvilles, estimaient qu’ils se compteront par milliers sinon par dizaines de milliers. Partout des corps sont encore coincés sous les tôles et l’odeur de putréfaction monte de plusieurs quartiers, ne laissant aucun doute sur l’ampleur de la catastrophe. De nombreux enfants risquent d’être parmi les victimes car plus de la moitié de la population a moins de 18 ans. Cet abandon fait aussi craindre le développement d’épidémies, car les dépouilles contaminent les ruisseaux, seuls points d’accès à l’eau dans bien des endroits.
Face à cette situation que les habitants décrivent comme apocalyptique, l’État a choisi d’amener des renforts de policiers et de gendarmes. Ceux-ci gardent par exemple le rond-point devant la résidence du préfet alors qu’à quelques centaines de mètres, des quartiers entiers sont à terre. Le premier porte-conteneurs arrivé depuis la Réunion, acheminait des vivres mais aussi des blindés et des camions militaires. L’État se soucie plus d’avoir les moyens de réprimer une possible explosion de colère que d’apporter les biens indispensables à la survie des habitants.
Au milieu du chaos, les magasins qui ont commencé à ouvrir en ont profité pour augmenter leurs prix. Macron a prétendu qu’un décret bloquait les prix des produits de première nécessité à leur niveau du 13 décembre, veille du cyclone. Mais dans la réalité il n’en est rien et les policiers, pourtant experts en matière de contrôle des personnes, ne vont pas contrôler les prix.
Si Macron a été pris à partie par des Mahorais criant « Macron démission ! » ou encore « de l’eau, de l’eau, de l’eau », bien des habitants n’attendent rien de l’État et comptent sur la solidarité pour faire face à l’urgence. Ainsi les habitants des bidonvilles ont commencé à reconstruire leurs abris, avec l’aide de leurs voisins. La récupération des matériaux dispersés par le cyclone, indispensable pour reconstruire, est présentée comme du pillage par la députée Youssouffa. Les écoles encore debout continuent à abriter des familles. Les habitants relaient les informations par tous les moyens possibles, sachant que les communications restent très compliquées.
Certains dénoncent la grosse ficelle des politiciens qui cherchent à détourner la colère vers les immigrés : « On n’a pas besoin de plus de moyens contre l’immigration. On a besoin que la France investisse vraiment pour la reconstruction de Mayotte. » Et en effet, pour rebâtir toutes les infrastructures : écoles, hôpital, logements, routes…, qui étaient déjà défaillantes avant le cyclone, il faudra plus que la solidarité élémentaire. Il faudra des moyens massifs et les milliards nécessaires pour cela existent dans les coffres des trusts français, à commencer par ceux présents à Mayotte, comme CMA CGM, Vinci ou encore TotalEnergies.