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Leur société
Mayotte : violence d’État
Depuis lundi 2 décembre, à Mayotte, l’État a entrepris la plus grande destruction d’habitations de l’histoire de l’île. Le préfet avait promis qu’avec lui, ça serait « Wuambushu tous les jours », du nom de l’opération de chasse aux pauvres menée au printemps 2023 et renouvelée en 2024. Il a tenu parole.
Le village de Mavadzani, un bidonville de 13 hectares où vivaient près de 5 000 personnes, n’est plus qu’un amas de tôles et de gravats. Prévenus à l’avance, la majorité des habitants se sont organisés pour récupérer les tôles, bâches plastiques et autres matériaux de fortune et sont partis à la recherche d’un nouveau coin de terre où reconstruire une habitation précaire. Sur les 465 cases détruites, la préfecture n’a proposé de solution d’hébergement qu’à 52 familles, celles qui avaient des papiers. Et encore s’agit-il de solutions temporaires, pour certains dans des préfabriqués.
Pour justifier ces expulsions, l’État met en avant un plan de construction d’un nouveau quartier, avec logements, crèche, école, commerces et même gendarmerie. Les habitants savent bien que la plupart d’entre eux ne pourront en profiter car il n’y aura pas assez de logements neufs et ils seront inaccessibles aux familles sans papiers. Et comme l’ont montré bien des décasages précédents, les chantiers prennent des années et en attendant il faut se débrouiller pour se mettre à l’abri.
Il y a de quoi être en colère et c’est pour réprimer une éventuelle réaction des habitants que la préfecture a fait venir 150 gendarmes supplémentaires, chargés de surveiller, arme au poing, que la destruction se déroulait sans encombre. Pour mener à bien sa guerre contre les pauvres, l’appareil d’État a ses spécialistes. Ainsi la personne de la préfecture chargée de la « résorption de l’habitat insalubre » s’est vantée de l’organisation minutieuse de l’opération, préparée depuis plus d’un an.
On voit quel est le sens des priorités des autorités dans cette île où l’eau continue à être coupée plusieurs jours par semaine, où des milliers d’enfants sont privés d’école, et où des épidémies de la misère, comme le choléra, sévissent. L’État, lui, se préoccupe de maintenir son ordre bourgeois, avec des fusils pour mettre des familles à la rue, et des gradés pour s’en féliciter.