Médicament anti-obésité : pour des profits en surpoids !23/10/20242024Journal/medias/journalnumero/images/2024/10/une_2934-c.jpg.445x577_q85_box-0%2C7%2C1262%2C1644_crop_detail.jpg

Leur société

Médicament anti-obésité : pour des profits en surpoids !

Le 8 octobre, le laboratoire danois Novo Nordisk a commercialisé en France le Wegovy, un médicament présenté comme une avancée thérapeutique majeure dans la prise en charge de l’obésité.

Novo Nordisk a fait le choix de proposer son médicament alors qu’il n’est pas encore remboursé par la Sécurité sociale, à un prix mensuel entre 270 et 360 euros qui ne le met pas à la portée de tous. Des négociations avec la Sécurité sociale devraient aboutir fin 2024 à un remboursement à l’issue d’une négociation serrée où comme d’habitude le secret commercial sera de mise. Actuellement, seul un médecin spécialiste en endocrinologie-diabétologie-nutrition peut le prescrire au cas par cas à des malades de moins de 65 ans présentant une obésité de classe II dite sévère et uniquement après l’échec d’une prise en charge nutritionnelle. La Haute Autorité de santé espère ainsi ne pas voir se reproduire en France ce qui s’est passé dans tous les pays où Wegowy a été commercialisé, à savoir une véritable ruée sur ce produit présenté comme miracle.

Commercialisé depuis 2021 aux USA, ce médicament est en fait le cousin d’un médicament antidiabétique, l’Ozempic, des mêmes laboratoires Novo Nordisk. En augmentant les doses du principe actif de l’Ozempic, ce qui permettait de perdre près de deux fois plus de poids (15 % contre environ 7 %) Novo Nordisk a positionné le Wegowy dans l’obésité en laissant à l’Ozempic le marché tout à fait profitable des diabétiques. Mais le marché de l’obésité l’est encore bien plus, et Wegovy a connu une explosion des ventes malgré les restrictions médicales des autorités de santé américaines. Wegovy a été popularisé sur les réseaux sociaux, comme Tik-Tok, à coups de photos « avant et après ». Des stars comme Elon Musk ou Oprah Winfrey ont, dans des spots publicitaires, vanté le médicament qui les aurait fait maigrir de 20 % ! La cible était clairement définie : le milliard de malades obèses dans le monde à l’horizon 2030, un nombre en constante augmentation. Après les obèses des USA (40 % de la population) puis ceux de la Chine où Wegovid est commercialisé depuis 2023 (200 millions d’obèses et 400 millions de personnes en surpoids) ce sont donc aujourd’hui ceux de France.

Sur ces marchés prometteurs, Novo Nordisk n’est bien sûr pas resté longtemps seul. La promesse de profits faramineux a attiré depuis l’américain Lilly, qui commercialise le Mounjaro. Aujourd’hui se pressent d’autres trusts pharmaceutiques : Roche, Pfizer, Astra-Zeneca bien décidés à prendre leur part du gâteau. Pour Novo Nordisk en tout cas, ces milliards sont déjà gagnés et ce petit laboratoire danois qui ne jouait pas dans la cour des grands est devenu en 2023 la première capitalisation boursière en Europe, pesant même plus lourd que LVMH. À Wall Street il pèse 512 milliards de dollars, en hausse de plus de 200 % depuis 2020.

Pour les trusts il y a là l’espoir de profits énormes. Pour les malades c’est peut-être l’espoir de disposer, pour traiter une maladie grave comme l’obésité, d’un médicament plus efficace que ceux qui existent actuellement, mais qui, comme tout médicament, n’est pas sans risque et ne doit sûrement pas être utilisé à tort et à travers.

Dans ce domaine le souvenir du scandale du Mediator des laboratoires Servier, lui aussi vendu comme coupe-faim à des malades qui n’auraient jamais dû en prendre, et qui a fait des milliers de victimes, entraînera peut-être une plus grande vigilance. Mais rappelons qu’il a fallu le combat de longue haleine d’une pneumologue, Irène Frachon, pour qu’éclate enfin le scandale, que le Mediator soit interdit et que des procès aient lieu, alors que les autorités de santé restaient inactives. L’histoire des scandales médicaux ne s’arrêtera sûrement pas avec le Mediator, la course effrénée aux profits des laboratoires risque d’en ouvrir de nouveaux chapitres.

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