Milee : la faillite ne ruine que les travailleurs23/10/20242024Journal/medias/journalnumero/images/2024/10/une_2934-c.jpg.445x577_q85_box-0%2C7%2C1262%2C1644_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Milee : la faillite ne ruine que les travailleurs

Les travailleurs de l’entreprise Milee en faillite manifestaient le 8 octobre devant le ministère de l’Économie et des Finances. 10 000 salariés sont aujourd’hui jetés à la rue et une partie d’entre eux se retrouve sans ressource, ne pouvant même pas bénéficier des quelques garanties prévues par la loi.

Les travailleurs de Milee distribuaient des prospectus publicitaires dans les boîtes à lettres. Ils travaillaient à temps partiel, en moyenne seize heures par semaine pour un salaire de 650 euros brut. Une partie d’entre eux étaient des retraités âgés, voire très âgés, fait qui confirme le caractère ignoble de la campagne menée par le gouvernement contre les retraités accusés d’être des privilégiés. 1 700 avaient ainsi plus de 70 ans, avec une retraite ne leur permettant pas de vivre. Bien souvent les heures n’étaient pas payées en totalité et les plaintes étaient fréquentes au sujet des kilomètres réalisés avec leur véhicule personnel et non indemnisés. Il y avait aussi chez Milee beaucoup de mères seules et de salariés peu payés cherchant un complément de ressources.

Aujourd’hui, tous se retrouvent sans salaire. Les liquidateurs, qui doivent transmettre les documents nécessaires à l’AGS, l’association de garantie des salaires, disent ne pas les avoir encore reçus et de toute façon ils s’affirment débordés. De plus l’AGS ne couvre qu’une période de 45 jours et les licenciements sont étalés de juillet à la fin septembre. Au-delà, il faudra attendre de voir s’il y a des fonds disponibles. Enfin, les salariés n’ont pas reçu d’attestation de travail de la part du liquidateur, ce qui empêche ceux qui en auraient le droit de s’inscrire au chômage ou de travailler en intérim. Mais pendant ce temps, il faut nourrir la famille, payer le loyer et souvent verser des agios aux banques.

Pourtant, si les anciens salariés sont dans la détresse, le trio possédant l’entreprise a toujours su préserver ses intérêts. Il s’est versé 70 millions d’euros de dividendes et figurait encore en 2023 au classement des 500 premières fortunes professionnelles françaises. Pendant des années, il a profité de l’exploitation éhontée de travailleurs dans la détresse. Milee est issue d’Adrexo, une entreprise qui se positionnait en concurrente de la Poste pour la distribution des imprimés publicitaires. En 2017 une filiale du groupe Ouest France s’était débarrassée d’Adrexo en la vendant pour un euro symbolique à trois de ses anciens cadres, en leur laissant en outre le siège d’Aix-en- Provence et en injectant 48 millions d’euros dans le compte d’Adrexo. L’entreprise perdait déjà de l’argent, mais ses nouveaux propriétaires pensaient que cela ne les empêcherait pas d’en tirer profit, ce qu’ils ont fait pendant des années au détriment des salariés, tout en continuant à accumuler les dettes.

En 2022 ses dirigeants ont préféré changer le nom de l’entreprise en Milee, après le fiasco, sanctionné par une lourde amende que fut l’incapacité d’Adrexo à distribuer la propagande électorale des élections régionales de 2021. Les mêmes méthodes ont perduré jusqu’à la faillite finale, qui n’empêchera pas les actionnaires de profiter des richesses accumulées.

C’est ainsi qu’aujourd’hui 10 000 travailleurs sont plongés dans la misère pour le profit de quelques margoulins dont les intérêts sont protégés par la loi sur les faillites.

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