Russie : ce qui “préoccupe” le régime…09/04/20252025Journal/medias/journalnumero/images/2025/04/une_2958-c.jpg.445x577_q85_box-0%2C7%2C1262%2C1644_crop_detail.jpg

Dans le monde

Russie : ce qui “préoccupe” le régime…

Entamés en fanfare par Trump fin février, les pourparlers sur un cessez-le-feu en Ukraine non seulement n’avancent guère, mais semblent au point mort.

Le 7 avril, Poutine a fait savoir qu’il « soutient l’idée d’un cessez-le-feu, mais que, avant cela, toute une série de questions reste en suspens. » Il y aurait, selon lui, « l’incapacité du régime de Kiev à contrôler plusieurs groupes extrémistes » –des ultranationalistes –et « les projets de militarisation ultérieure » de l’Ukraine –comme l’envoi de troupes, dont Macron et le Premier ministre britannique, prétendent qu’elles garantiraient la paix.

Est-ce là un problème pour le Kremlin ? Ou s’empare-t-il de prétextes destinés à faire monter les enchères, dans l’espoir que Trump, qui aura de toute façon le dernier mot dans un éventuel accord, fasse plus de concessions à Moscou ? L’avenir le dira.

En attendant, le chef de la diplomatie américaine Marco Rubio affirme que Trump ne tombera « pas dans le piège de négociations interminables » et que « nous saurons assez vite […] si la Russie est sérieuse ou non en ce qui concerne la paix ».

Guerre de communiqués et bluff diplomatique font partie de la guerre tout court. Maintenant si Trump ménage Poutine – ainsi sa décision d’augmenter fortement ses tarifs douaniers pour tous les pays épargne la Russie – et si l’armée de Moscou continue d’avancer au détriment de Kiev, en Russie même la situation intérieure n’a rien pour réjouir le régime.

L’inflation, dont Poutine a dit en décembre, un aveu inhabituel de sa part, qu’elle constituait « un signal préoccupant », a atteint 10,06 % en février. En un an, les prix de l’alimentation ont crû en moyenne de 11 %. C’est bien plus pour l’huile de tournesol et le beurre (+ 36 %, selon l’organisme officiel des statistiques Rosstat), ce qui a fait la une de la presse nationale.

Tout indique que l’inflation, en forte progression depuis deux ans sur fond de guerre, se poursuit, et donc aussi l’écrasement du pouvoir d’achat des classes laborieuses et populaires. Et tous les budgets sociaux sont laminés car la moitié du budget de l’État va désormais à « l’effort de guerre ».

Dans un premier temps, cela avait dopé l’économie, en tout cas les industries d’armement. Dans certaines branches, les salaires en avaient aussi profité. En effet, entre le million d’hommes qui ont fui la mobilisation en s’exilant et un nombre plus élevé d’hommes partis au front, beaucoup d’entreprises sont venues à manquer de main-d’œuvre et ont cherché à en attirer par des salaires revus à la hausse. Bien sûr, le Kremlin a pu se targuer de l’effet « bénéfique » de son « opération spéciale » en Ukraine. Mais cet effet n’a eu qu’un temps.

Récemment, le vice-ministre de l’Industrie a admis que « les salaires ont cessé de croître dans le complexe industriel de la défense ». Mais ailleurs, cela fait plus de deux ans que les salaires sont en berne. Et cela se fait déjà sentir en divers endroits. En Khakassie, une république de Sibérie centrale, pauvre et n’ayant d’autres ressources que l’extraction du charbon, réseaux sociaux et presse locale tirent périodiquement à boulets rouges sur les directions qui ne versent plus qu’avec retard les salaires des soignants et des enseignants. À Perm, la capitale de l’Oural occidental (plus d’un million d’habitants), cela fait trois mois que la direction d’une grande usine, qui fabrique des machines et équipements pour les houillères, ne verse plus les salaires.

Ce ne sont que quelques exemples récents. Dans la population, au désenchantement d’avoir vite vu que la paix, qu’elle espérait à portée de main, n’est pas pour demain, s’ajoute l’inquiétude largement partagée que suscite le fort recul de son niveau de vie.

Poutine y voit « un signal préoccupant » pour lui et ceux, les oligarques et les bureaucrates, dont il protège les intérêts. Il a sans doute quelques raisons de craindre que cela puisse se muer en colère de la population et, souhaitons-le, que sa colère se retourne contre ce régime de parasites.

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