Russie-Ukraine : l’impérialisme américain reste maître du jeu26/03/20252025Journal/medias/journalnumero/images/2025/03/une_2956-c.jpg.445x577_q85_box-17%2C0%2C3294%2C4244_crop_detail.jpg

Dans le monde

Russie-Ukraine : l’impérialisme américain reste maître du jeu

Si l’on en croit les représentants américains, russes et ukrainiens, les négociations sur une possible trêve en Ukraine, entamées en Arabie saoudite, ont avancé. Vers quoi, c’est une autre affaire.

En effet, même placés devant les caméras du monde entier, ces pourparlers ne sortent pas du cadre habituel de la diplomatie : celui du secret des tractations entre gouvernants sur le dos des gouvernés. Ce qu’on présente comme un début d’avancée relèverait de la plaisanterie, si ce n’était tragique. Ainsi, le 18 mars, les belligérants avaient à peine « décidé » de ne plus frapper les infrastructures énergétiques que, dans la soirée, drones et missiles russes et ukrainiens s’abattaient sur les raffineries, dépôts de carburant et centrales thermiques de l’adversaire.

Mardi 25 mars, douze heure d’un « dialogue difficile mais utile »,selon Moscou, ont permis à Washington d’annoncer un accord sur la libre circulation des navires marchands en mer Noire, réclamé par le Kremlin. Si Kiev a déclaré qu’il appliquerait ce qu’annonce la Maison-Blanche, il a souligné qu’il reste « des détails à régler ». Et parmi ces «détails », il y a l’exigence de la levée des sanctions occidentales visant leurs exportations de céréales et d’engrais. Trump s’y dit favorable, le gouvernement de Kiev s’y oppose...

Il y a un an et demi, Kiev et Moscou, en pleine guerre, avaient déjà conclu un accord, mutuellement profitable à leurs exportations céréalières. Cela ne les avait pas empêchés de continuer à couler des navires marchands ennemis. Et le 24 mars, juste avant d’en discuter avec les envoyés de Trump à Riyad, le Kremlin avait saturé le ciel ukrainien de missiles et bombes volantes, faisant des centaines de blessés et des dizaines de morts à Kiev, Kharkiv, Soumy, etc., tandis que Kiev bombardait le Donbass tenu par la Russie.

Même si, un jour, un cessez-le-feu finit par être conclu, en attendant, les combats continuent et même s’intensifient. Et ils pourraient s’intensifier encore tant que les deux états-majors disposeront d’assez d’hommes à envoyer à l’abattoir. Pour liquider la poche de Koursk tenue par des unités ukrainiennes depuis l’été dernier, Moscou l’a noyée sous un flot d’obus et d’assaillants, dans ce qui a été une boucherie de part et d’autre. Il ne fallait pas permettre à Kiev d’avoir un morceau de territoire russe à marchander contre les régions d’Ukraine qu’occupe l’armée russe, Moscou attendant d’un accord « de paix » qu’il avalise cette annexion.

La Russie se trouve en position de force sur le champ de bataille, son armée grignotant sans cesse du terrain, et Poutine ne se presse donc pas de trouver un accord car le temps joue pour lui. Pourtant, contrairement à la présentation qu’en font gouvernements et médias européens, la Russie est loin d’avoir toutes les cartes en main et ce n’est pas elle qui dicte le rythme et les règles du jeu. Sinon, comment expliquer que les États-Unis, situés sur un autre continent que l’Ukraine, se soient imposés « naturellement » comme le chef d’orchestre de ces négociations ? L’Union européenne en a été écartée, bien que cette guerre se déroule à sa porte, et ce sont les États-Unis qui en donnent le la, en fixent l’agenda et en discutent le contenu en tête-à-tête avec chaque belligérant. Plus encore, Washington a obtenu pour cela l’accord de chacune des parties, y compris lorsque Trump dicte en public avec brutalité ses conditions à Zelensky. Mais cela vaut aussi pour Poutine, qui a dû accepter sans broncher de voir l’Amérique s’emparer des gisements de terres rares d’Ukraine qu’il ne tient pas encore.

Rien de tout cela ne serait explicable si l’on ignorait l’état du monde actuel, dominé par une poignée de puissances impérialistes. Et la bourgeoisie américaine est, et de loin, celle qui a l’économie la plus forte, la richesse la plus grande, l’armée la plus puissante, capable d’imposer sa politique presque partout avec 800 bases militaires réparties à la surface du globe.

Certes, quelques pays – la Chine, la Russie et quelques autres – ont les moyens de ne pas plier sans discuter devant la première puissance mondiale. Il n’en reste pas moins que c’est cette supériorité écrasante de l’impérialisme américain qui, après avoir poussé ses pions en ex-URSS en y créant les conditions d’un conflit militaire entre la Russie et l’Ukraine, lui permet maintenant de prétendre préparer la paix. À la façon des « juges de paix » qui font la loi chez les mafieux : dans un bain de sang, mais ici à l’échelle de pays entiers.

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