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Dans le monde
Syrie
l’impérialisme à la manœuvre
Le 29 novembre, Alep, deuxième ville syrienne, contrôlée depuis huit ans par le régime de Bachar Al-Assad, a été reprise par une coalition emmenée par l’organisation Hayat Tahrir Al-Cham (HTC), l’ancienne branche syrienne d’Al-Qaïda.
La chute d’Alep en trois jours, presque sans combat, face à l’Armée arabe syrienne (AAS) de Bachar Al-Assad qui n’a quasiment pas opposé de résistance, a surpris dans une période où tous les projecteurs sont braqués sur les guerres d’Israël à Gaza et au Liban. Mais cette réactivation de la guerre syrienne, larvée depuis cinq ans après les violents combats et les centaines de milliers de morts de la décennie 2010, résulte directement des changements de rapports de force provoqués par les guerres d’Israël soutenues par les États-Unis.
Depuis 2011, la Syrie a été transformée en théâtre d’un affrontement entre les puissances, régionales et internationales, qui se disputent l’influence sur le Moyen-orient. Après s’être toutes alliées pour combattre Daech, ces puissances se sont partagé la Syrie. Depuis le tournant des années 2020, le pays est découpé en plusieurs territoires. Le plus grand morceau est sous le contrôle de Bachar Al- Assad soutenu par la Russie et l’Iran. Le Nord-Est est administré par les Forces démocratiques syriennes à majorité kurde, plus ou moins soutenues par les États-Unis. Le Nord-Ouest est contrôlé par des milices islamistes et par l’armée turque, tandis que la région d’Idlib, proche d’Alep, l’est par des milices semblables, en particulier l’organisation HTC, mais sans présence directe de l’armée turque. Ces milices sont soutenues notamment par l’Arabie saoudite.
Alep avait été reconquise en décembre 2016 par les troupes d’Assad, aidées par l’aviation russe, les Pasdarans iraniens et le Hezbollah libanais, au prix de terribles destructions et de déplacements de population. Mais depuis un an, le Hezbollah et l’Iran sont accaparés par la guerre que leur livre Israël. Depuis 2022, l’essentiel des forces militaires russes sont déployées en Ukraine. Le régime d’Assad s’en trouve affaibli. Selon plusieurs témoignages, les soldats de l’AAS qui gardaient Alep, mal nourris, mal traités, n’ont opposé aucune résistance. Du fait de la corruption massive, de la répression systématique et des sanctions américaines qui perdurent, le régime d’Assad a perdu beaucoup des soutiens qui lui restaient parmi la population. En outre, tout indique que les milices emmenées par HTC ont pu bénéficier de l’aide logistique et de livraisons d’armes venant de la Turquie.
Les dirigeants des pays qui justifient toutes leurs guerres par la lutte contre le terrorisme et l’islamisme, n’ont aucun scrupule à armer un groupe issu d’Al-Qaïda. Aujourd’hui, les dirigeants de HTC, toujours classés comme terroristes par les États- Unis, proclament qu’ils ont changé, qu’ils respectent tous les Syriens, qu’ils soient musulmans d’une obédience ou d’une autre, qu’ils soient chrétiens ou kurdes, pourtant menacés par l’armée turque. Pour se faire accepter de la population d’Alep et pour donner des gages aux dirigeants occidentaux, les chefs de HTC affirment que « la diversité sera une force et pas une faiblesse ».
L’avenir dira si la prise d’Alep marque le début de la chute de Bachar Al-Assad et si les dirigeants impérialistes se préparent à aider HTC et ses alliés à le remplacer au pouvoir. Pour la population syrienne, c’est la promesse de nouveaux affrontements, bombardements et destructions et peut-être du remplacement d’une dictature par une autre.